STÉNOGRAMME DE L'INTERVIEW D'I.S.IVANOV, MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE LA RUSSIE, ACCORDÉE À LA CHAÎNE TV “AL-JAZEERA”, MOSCOU, LE 25 JANVIER 2003
Traduction non-officielle du russe
Question: Monsieur le Ministre, qu'attend la Russie de la séance du Conseil de Sécurité de l'ONU pour l'Irak le 27 janvier?
I.S.Ivanov: Nous attendons que le 27 janvier, à la séance du Conseil de Sécurité de l'ONU, seront présentés les rapports de H.Blix, dirigeant de l'UNMOVIC, et de M.ElBaradei, directeur de l'AIEA, sur le travail qui avait été fait par les inspecteurs pendant les deux derniers mois. Ces rapports sont très importants, car ils doivent permettre au Conseil de Sécurité de l'ONU de définir les pas ultérieurs à déployer.
Selon l'information préliminaire que nous possédons, en général le travail des inspecteurs en Irak a été satisfaisant, sans qu'ils aient rencontré de sérieux problèmes. Actuellement, en Irak se trouve un très grand groupe d'inspecteurs, plus de 110 personnes, représentant près de 60 états. Au total, compte tenu du personnel auxiliaire, y travaillent près de 250 personnes. C'est un grand groupe de professionnels complets, experts dans leur domaine, qui doivent donner la réponse à la question principale posée par le Conseil de Sécurité de l'ONU et la communauté internationale: l'Irak possède-t-il des armes d'extermination massive? Seuls les inspecteurs peuvent donner une réponse professionnelle à cette question. C'est pourquoi nous croyons qu'ils doivent continuer leur travail en Irak.
Question: Il est possible qu'il n'y ait pas de violations graves, mais le représentant des USA insiste que le Conseil de sécurité donne le feu vert au début des actions militaires en Irak. Quel est le rapport des forces au Conseil de Sécurité? On sait que la France a dйjà proclamé qu'elle était contre les actions militaires, l'Allemagne aussi.
I.S.Ivanov: Avant tout, je veux dire que nous tous - membres du Conseil de Sécurité de l'ONU – devons être consécutifs en menant notre ligne. Si vous vous rappelez, le 12 septembre dernier, G.Bush, Président des Etats-Unis, est intervenu à l'Assemblée Générale de l'ONU, où, parlant du problème de l'Irak, il a appelé à déployer des efforts pour obtenir le retour inconditionné des inspecteurs en Irak, pour qu'ils puissent commencer à remplir leur mission. La communauté internationale l'a obtenu. L'Irak a donné son accord au retour inconditionné des inspecteurs. Les inspecteurs sont des fonctionnaires internationaux. Bien qu'ils soient citoyens de pays isolés, ils ne relèvent que du Conseil de Sécurité de l'ONU. Aujourd'hui, les inspecteurs travaillent. Nous voulions l'obtenir, puisque nous partions du fait que seuls les inspecteurs pourraient résoudre le problème essentiel, autour duquel la communauté internationale est unie: l'Irak ne devra pas posséder d'armes d'extermination massive. Aujourd'hui, il y a toutes les chances pour, premièrement, résoudre ce problème essentiel et, deuxièmement, le résoudre par voie politique, c'est-à-dire par la voie à ne pas aggraver la situation autour de l'Irak, dans la région, au Proche-Orient et dans le monde en général. C'est pourquoi nous croyons qu'à présent, il n'y a pas de raison d'user de la force. L'usage de la force est une mesure extrême. Il ne faudra en user qu'en dernier lieu, où il n'existe pas d'autre issue.
Nous croyons qu'aujourd'hui, nous ne nous trouvons pas dans la situation où il faut utiliser des mesures extrêmes. Cette position est partagée par la majorité des membres du Conseil de Sécurité. Certains - plus ouvertement, certains, peut-être, moins ouvertement. Compte tenu de mes constants contacts avec tous les membres du Conseil, je peux vous assurer que la majorité des membres du Conseil de Sécurité se prononcent pour la politique du règlement, pour la poursuite de l'activité des inspecteurs.
Question: A tout moment peut apparaître la variante suivante. Les USA convoquent le Conseil de Sécurité et proposent la variante de force. Est-ce que la Russie la soutiendra ou y apposera son veto?
I.S.Ivanov: Il est tout à fait évident que dans la situation actuelle, compte tenu du travail des inspecteurs et en général du développement de la situation autour de l'Irak, je doute fort que le Conseil de Sécurité puisse donner son accord à l'usage de la force. Je ne sais si l'on devra user du droit de veto ou d'autres formes de la prise des décisions, mais encore une fois je veux dire, j'en suis profondément persuadé, qu'il n'y a pratiquement pas de chances à espérer qu'aujourd'hui, le Conseil de Sécurité donne son accord à l'usage de la force. Il m'est difficile de prédire l'évolution des événements. C'est pourquoi je n'aimerais pas disserter ici, qui votera "contre", qui votera "pour". L'essentiel n'est pas d'avoir le veto ou pas. L'essentiel, je répète: c'est qu'aujourd'hui, je ne vois pas de chances de la prise par le Conseil de Sécurité de l'ONU de la décision qui autoriserait l'usage de la force.
Question: Monsieur le Ministre, existent-ils des différends parmi les dirigeants russes à propos de l'Irak? Je lis et entends souvent qu'il existe un groupe, qui dit à V.V.Poutine que S.Hussein est un dictateur, pourquoi allons-nous défendre l'Irak? Peut-être vaudra-t-il vraiment mieux de coopérer avec les USA dans la lutte contre le terrorisme, contre les régimes dictateurs comme l'Irak.
I.S.Ivanov: J'ajouterai à vos propos une autre question que me posent certains de mes partenaires occidentaux, principalement aux USA: avec qui êtes-vous, avec le régime de S.Hussein ou avec nous, le monde civilisé?
Je crois que toutes les questions posées ainsi sont injustes. Notre position est très claire, unique. Aucune scission ou différend n'existe parmi les autorités. De cela, je peux vous assurer.
Dans nos approches à la solution du problème irakien, nous ne nous guidons pas sur un but strictement intéressé. D'aucuns disent que nous voulons y recevoir plus de pétrole, d'autres disent que nous voulons évincer un autre pays de la région. Tout cela ne correspond pas à la réalité. Nous partons avant tout du respect des Statuts de l'ONU et du droit international. Il existe les résolutions du Conseil de Sécurité de l'ONU qui doivent être appliquées par tous. Vous savez, dans quelles conditions historiques ces résolutions ont été prises. C'est pourquoi il est erroné de dire que ces résolutions ont un caractère objectif ou non. Ce n'est pas actuellement le sujet à discussion. Il existe les résolutions, et elles doivent être appliquées. La Russie se prononce pour la stricte application des résolutions du Conseil de Sécurité de l'ONU.
Et d'un. Nous avons, certes, nos intérêts en Irak. Ces intérêts sont de caractère économique. Cependant, ce ne sont pas les intérêts à si grande échelle pour nous faire changer notre ligne de principe du règlement politique en Irak. C'est pourquoi, vous devriez y faire attention, nous avons toujours prôné l'action de tous les pays dans le cadre des résolutions correspondantes du Conseil de Sécurité. A ce propos, nous avons même eu des différends avec l'administration irakienne, par exemple, quand elle avait déclaré que par le Conseil de Sécurité de l'ONU, il était impossible d'obtenir la levée des sanctions, c'est pourquoi il n'y aurait aucune raison de faire retourner les inspecteurs. Nous avons toujours persuadé la partie irakienne que la seule voie pour obtenir la levée des sanctions passait par le Conseil de Sécurité de l'ONU. Et pour que le Conseil de Sécurité de l'ONU prenne cette décision, on a besoin de reprendre l'activité des inspecteurs qui a pour but la collecte de l'information objective. Je parle de ce qu'on a besoin d'obtenir la poursuite de l'activité des inspecteurs, puisque cette voie seule ouvre la perspective de la levée des sanctions et du règlement définitif du problème.
Je veux vous assurer: la Russie ne connaît aucun différend, aucune hésitation dans sa position. Parfois, nous voyons apparaître des difficultés avec l'administration irakienne, parfois - avec nos partenaires occidentaux, cependant, nous n'abandonnons pas notre ligne.
Question: Hier, vous avez déclaré que les inspecteurs en Irak subissent la pression de la part de certaines forces aux Etats-Unis. Pourriez-vous expliquer, de quelles forces précisément?
Réponse: Il suffit d'écouter les déclarations qu'on fait, lire les documents qui apparaissent périodiquement dans les médias, pour voir qu'à Washington, il y a certaines forces qui sont mécontentes, que les inspecteurs ne puissent encore présenter de preuves valables que l'Irak avait violé la résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU. Aujourd'hui, ces forces essaient de mettre en doute le besoin même de l'activité des inspecteurs. Elles disent que les inspecteurs ne pourraient rien faire. Elles déclarent que ce ne sont pas les inspecteurs qui doivent montrer et prouver, que l'Irak ne possède pas d'armes d'extermination massive, mais Bagdad lui-même doit le faire. Elles affirment que l'activité des inspecteurs est sans grand apport et mettent en doute l'utilité de leur travail ultérieur. C'est là le facteur de la pression morale, psychologique, sur les inspecteurs. Les inspecteurs doivent jouir du soutien et de la confiance. Et quand la confiance est mise en doute, certes, il leur est plus difficile de travailler. Nous croyons que c'est inadmissible. Nous avons tous besoin de l'information objective. Les inspecteurs doivent agir sans pression étrangère.
Question: Récemment, la presse occidentale et arabe a fait beaucoup de bruit à propos de la soi-disant proposition faite par Moscou à S.Hussein d'abandonner son poste et de venir à Moscou.
I.S.Ivanov: Premièrement, la Russie n'a pas fait cette proposition, ne la fait ni ne la fera à personne. Il n'y a ni n'aura jamais de négociations, de contacts, ouverts ou confidentiels. Périodiquement, les médias occidentaux publiaient cette version. Elle est, sûrement, le fruit des gens de mauvaise foi, qui veulent ou voudraient qu'il en soit ainsi. Soit qu'ils cherchent à jeter un doute quant à la politique de principe de la Russie sur ce problème. Je répète, aucun contact à aucun niveau, dans aucun format n'a ni n'aura lieu. Nous le considérons comme l'ingérence dans les affaires intérieures d'un état souverain.
Question: Igor Serguéiévitch, il y a bien eu des déclarations de l'administration G.Bush à propos de ce que les intérêts économiques de la Russie seront maintenus au cas où elle donne son accord au déclenchement de la guerre en Irak?
I.S.Ivanov: Naturellement, ces négociations et discussions n'ont pas été ni ne pouvaient être tenues, puisque, comme je vous ai dit, nous prônons le règlement politique. Cependant, certes, nous nous prononçons pour ce qu'après le règlement de la situation en Irak, nos intérêts dans ce pays soient respectés, surtout compte tenu de leur caractère profond et du fait qu'ils ne datent pas d'il y a un an, ou deux, ou trois. Nos relations économiques se construisaient durant des décennies. Beaucoup d'entreprises ont été construites avec la participation et l'aide de l'Union Soviétique, puis de la Russie. Aujourd'hui, ces objets sont reconstruits. Comme tout autre pays qui possède des intérêts économiques, la Russie va lutter pour que ses intérêts économiques soient respectés et maintenus en Irak, comme dans tout autre endroit.
Question: Igor Serguéiévitch, récemment, Monsieur D.Rumsfeld a ignoré la France et l'Allemagne et pourrait bientôt ignorer la Russie, et les USA commenceront la guerre en Irak. Quelles seront dans ce cas la tactique et la stratégie de la Russie?
I.S.Ivanov: Avant tout, quelques mots à propos de la polémique qui a paru ces derniers temps dans les médias entre les représentants des états leaders du Conseil de Sécurité de l'ONU. A propos, je veux dire que ce genre de polémique ne profite pas à nos intérêts communs. Aujourd'hui, nous devons, même en cas de différends, trouver des formes pour les surmonter, qui n'affaiblissent pas l'unité de la communauté internationale dans la résolution des problèmes globaux, avant tout des problèmes de la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue, avec la menace de la prolifération d'armes d'extermination massive, etc. Au cours de leur résolution vont, certes, apparaître des différends, puisqu'il n'existe pas de formule toute faite ou d'ordonnance, dont on pourrait dire que c'est précisément de cela qu'on a besoin. On mène des recherches des voies de la résolution de manière à ce que, d'une part, le problème soit résolu, et d'autre part – pour que les intérêts globaux de la communauté internationale ne souffrent pas. C'est pourquoi nous, par exemple, croyons que les politiciens, surtout les politiciens de grande envergure, doivent se placer au-dessus des différends qui surgissent, et se guider tout de même sur l'objectif principal.
Nous espérons que le monde ne connaîtra aucune scission grave. La Russie n'y est pas intéressée. Globalement parlant, les politiciens doivent être unis par un but commun – la lutte pour les intérêts de la sécurité et de la stabilité non seulement en Irak, mais sur un plan plus large. L'Irak constitue un problème très compliqué, au moment donné - un des plus graves, mais qui n'est pas de loin l'unique ni le plus compliqué. Il existe des problèmes non moins compliqués, par exemple, le Proche-Orient, d'autres conflits régionaux, ou, considérant la situation à l'échelle plus globale – la lutte contre le terrorisme.
Est-ce que nous pouvons croire qu'en Afghanistan, tout est dйjà en ordre? Là aussi, un grand nombre de problèmes persistent, et si nous allons en débattre au lieu d'unir nos efforts, ils ne seront jamais résolus. A ce propos, le but principal que la Russie veut atteindre auprès du Conseil de Sécurité et dans ses contacts avec nos partenaires, est de surmonter ces différends et de maintenir l'unité. Nous croyons qu'une action unilatérale de force contre l'Irak, en contournant le Conseil de Sécurité de l'ONU, serait très dangereuse. Cette action porterait un grand coup à l'unité de la communauté internationale, à la coalition antiterroriste internationale. Elle scinderait cette coalition et affaiblirait nos efforts dans la lutte contre le terrorisme. Si d'aucuns espèrent que cette action de force pourra résoudre le problème de l'Irak (même s'ils ont raison, s'ils le croient), on n'a pas le droit de sacrifier à ces actions les problèmes plus larges, globaux. On pourra résoudre un problème, mais perdre ailleurs, perdre en général la solidarité et l'unité de la communauté internationale qui se sont formées après le 11 septembre 2001 dans la lutte contre le terrorisme. Je crois que les politiciens doivent se guider précisément sur ces intérêts globaux, à long terme, quand ils prennent telle ou telle décision concrète.
Question: Vous n'avez tout de même pas répondu à ma question à propos des actions de la Russie en cas du début de la guerre avec l'Irak.
I.S.Ivanov: Toute guerre, une fois commencée, doit se terminer un jour. Il n'y a pas de guerres à l'infini. Elles sont longues ou brèves. Nous allons, certes, faire tout pour l'éviter. Si la guerre est tout de même déclenchée, nous ferons tout pour l'arrêter au plus vite et pour que le processus du règlement reprenne le lit politique. Il est tout à fait évident que si la guerre commence, elle fera des victimes et, avant tout, parmi la population civile, elle fera des destructions. Nous nous rappelons comment cela se passe, nous avons eu beaucoup d'exemples, y compris récemment. C'est pourquoi, je répète, si cela se passe, nous allons chercher à obtenir que la partie militaire de l'opération se termine au plus vite et bascule dans le lit du règlement politique.
Question: Igor Serguéiévitch, concernant le règlement proche-oriental. A.Sharon a aussi ignoré vos initiatives et celles du "quatuor" à propos de la "carte routière". On sent que même l'administration G.Bush ne veut pas beaucoup déployer des efforts pour que ce processus se passe normalement. Quelle est votre position?
I.S.Ivanov: Au cours de la discussion du 20 décembre à la rencontre des ministres des affaires étrangères du "quatuor" à Washington à propos de la situation proche-orientale, nous avons pratiquement concerté la "carte routière". Le "quatuor" - ce sont l'ONU, la Russie, les USA et l'Union Européenne. Aujourd'hui, nous n'avons pas de différends de principe quant à cette "carte routière". Nous avons décidé de ne pas la présenter aux parties, puisqu'en Israël a débutй la campagne électorale. Vous savez vous-mêmes qu'au cours des campagnes électorales, les candidats occupent parfois des positions dures, radicales pour gagner les voix des électeurs. C'est pourquoi nous n'avons pas cru utile de rendre publique cette "carte" pendant la période de la campagne électorale. On aurait pu commencer à polémiquer autour de cette "carte routière", ce qui ultérieurement pourrait aggraver sa mise en pratique. Hier, j'ai rencontré les ministres des affaires étrangères de l'Union Européenne, et nous avons encore une fois confirmé l'aspiration à la "carte routière" que nous avions mis au point. Dès qu'en Israël les élections auront eu lieu, le nouveau gouvernement sera formé, nous allons proposer de tenir une nouvelle rencontre des ministres des affaires étrangères du "quatuor" pour présenter ensuite aux parties cette "carte routière" pour sa mise en pratique. Nous savons qu'Israël a certains doutes quant à la "carte routière". Il existe des doutes de la part des autorités palestiniennes. Mais c'est là le compromis. Un compromis n'est jamais unilatéral, un compromis suppose la solution du problème par voie de concessions de chaque partie. Chaque partie doit faire des pas réciproques. Ultérieurement, la tâche principale du "quatuor" sera d'obtenir le mouvement réciproque des parties l'une vers l'autre pour aboutir à la décision finale. Et la décision finale consiste en la création des deux états – d'Israël et de Palestine, qui pourraient coexister paisiblement dans les frontières sures.
Question: Ces derniers temps, on remarque que les relations entre la Russie et l'Arabie Saoudite se sont aggravées, en particulier, après la déclaration de V.V.Poutine, Président de la Fédération de Russie, qui avait directement accusé l'Arabie Saoudite du soutien et du financement du groupe antirusse en Tchétchénie. Quelle est la position des autorités à ce propos?
I.S.Ivanov: Avant tout, je veux dire que le Président V.V.Poutine n'a jamais accusé l'Arabie Saoudite du soutien des organisations terroristes. Le Président russe a dit qu'en Arabie Saoudite, il y a des forces et des groupes, qui se qualifient de fonds ou d'organisations de bienfaisance, et qui soutiennent clandestinement l'activité des organisations extrémistes terroristes, y compris sur le territoire de la Fédération de Russie. Nous en avons franchement parlé avec nos partenaires saoudiens et croyons qu'il est dans nos intérêts communs de ne pas l'admettre dans le cadre des efforts internationaux de la lutte contre le terrorisme. Vous savez très bien qu'il existe des résolutions correspondantes du Conseil de Sécurité, qui obligent chaque pays non seulement à ne pas contribuer à l'activité terroriste, mais éliminer l'activité des organisations terroristes ou autres depuis son territoire contre les états tiers. C'est pourquoi nos appels à l'administration de l'Arabie Saoudite sont tout à fait justifiés et basés sur les résolutions correspondantes du CS de l'ONU. Nous n'exigeons rien de plus. Néanmoins, nous sommes intéressés à ce que nos rapports avec l'Arabie Saoudite se développent dans l'esprit du profit et du respect mutuels. L'an dernier, nous avons tenu la séance de la commission intergouvernementale pour les échanges commerciaux, on a prévu de grands projets intéressants. Cette année, nous attendons la visite en Russie du Prince héritier de l'Arabie Saoudite. Je crois que nous pourrons discuter tous les problèmes, y compris ceux qui peuvent ombrager nos rapports. Est-ce que c'est dans l'intérêt de l'Arabie Saoudite que, depuis son territoire, des organisations financent les extrémistes-terroristes? Je pense que l'Arabie Saoudite est plutôt intéressée à ce que cela n'existe jamais. Je suis persuadé qu'à travers un dialogue constructif et franc, nous pourrons trouver la solution des problèmes qui peuvent surgir.
En général, je veux souligner que nous sommes intéressés au développement des relations d'envergure, prometteurs entre la Russie et l'Arabie Saoudite.
Question: Comment appéciez-vous les relations actuelles entre la Russie et les pays arabes, et quelle en est la perspective?
I.S.Ivanov: Ces dernières années, nous avons dans une grande mesure, très sérieusement, rétabli nos rapports avec les états arabes. Malheureusement, après la débâcle de l'Union Soviétique dans la première moitié des années 90, on a vu apparaître une sérieuse baisse dans ces rapports. Cela était dû aux raisons objectives, non pas au fait que la Russie ne voulait pas les développer. La Russie en ce temps-là était plus préoccupée de ses problèmes intérieurs et ne possédait pas de ressources nécessaires pour maintenir ces relations. Aujourd'hui, cette étape est finie. Aujourd'hui, la Russie est un état stable en développement. Le pays connaît la stabilité politique et économique. Dans ces conditions, nous sommes intéressés au développement des relations avec nos partenaires traditionnels que sont les pays arabes. Actuellement, ces rapports se développent. Avec certains pays, plus rapidement, avec d'autres, moins activement que nous l'aimerions. Je suis persuadé que l'évolution est en général positive, et nous chercherons à maintenir cette dynamique.
Question: On connaît votre initiative à propos du règlement du problème autour de la Corée du Nord. On sait qu'il y a des pays qui veulent poser cette question devant le CS de l'ONU. Nous savons que Russie y objecte.
I.S.Ivanov: Le problème qui existe aujourd'hui exige le règlement avant tout dans le cadre du dialogue entre Pyongyang et Washington. D'une part, nous tous – les Etats-Unis, la Russie, l'Europe, la Chine, le Japon – nous prononçons pour que la péninsule Coréenne possède le statut non nucléaire. Nous nous prononçons tous pour ce que la Corée du Nord reste dans le cadre du Traité de non-prolifération des armes nucléaires. C'est notre position de principe, et là, nous n'avons aucun différend. D'autre part, nous croyons justifiées les exigences de Pyongyang à propos de la réception des garanties de la sécurité, des garanties de ce que contre la Corée du Nord ne seront pas déployées des actions, nuisant à sa sécurité. Donc, nous devons trouver la solution "d'ensemble", - comme dit la Russie - qui, d'une part, lève la préoccupation de la Corée du Nord à propos de la sécurité du pays, et, d'autre part - garantisse le retour de la Corée du Nord au sein du Traité de non-prolifération des armes nucléaires et le rétablissement de la coopération avec l'AIEA sur le programme nucléaire. C'est là le sens du problème. Nous croyons que la communauté internationale doit et peut aider à sa solution. Cependant, aujourd'hui, il serait infondé de recourir à des méthodes de pression sur la Corée du Nord par voie de sanctions ou par voie de menaces, puisque cela ne peut qu'aggraver encore plus la situation. Aujourd'hui, ce n'est pas la question de pression ou de sanctions. On a besoin de pourparlers politiques et diplomatiques normaux, compte tenu des intérêts des parties. C'est dans cette direction que la Russie travaille.
Le 27 janvier 2003