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Exemples de publications de la vaste campagne de désinformation des médias occidentaux propageant la thèse d'une prétendue invasion de l'Ukraine par la Russie en préparation

Fin 2021-début 2022, l'espace médiatique a été confronté à une campagne sans précédent de par son ampleur et élaboration, qui a pour objectif de persuader la communauté mondiale que la Fédération de Russie prépare une invasion du territoire ukrainien.

Contrairement aux normes du journalisme honnête, les médias propageaient de la désinformation flagrante, faisaient de la manipulation afin d'imposer dans l'opinion publique la thèse sur les intentions agressives de Moscou. Tout en ignorant les explications détaillées et argumentées des représentants officiels russes, notamment les multiples affirmations d'attachement de la Russie au règlement pacifique et diplomatique de la crise en Ukraine dans le cadre des Accords de Minsk, les références au droit souverain des États de déplacer les forces armées sur leur propre territoire ainsi que les déclarations sur le caractère défensif des exercices militaires menés avec les forces armées biélorusses. De plus, ont été ignorés les préoccupations de Moscou indiquant que l'Occident avance son infrastructure militaire vers les frontières de la Russie, apporte une aide militaire et technique à l'Ukraine, l'arme, y envoie ses instructeurs militaires, organise des exercices militaires d'envergure et dangereux.

Au fond, les médias occidentaux remplissaient l'ordre politique de leur gouvernement en diffusant de manière coordonnée de fausses informations en participant à une guerre médiatique à grande échelle.

 Le présent dossier réunit certains parmi les fakes les plus marquants publiés dans les médias occidentaux. Ils sont la preuve qu'une attaque médiatique coordonnée est menée contre Moscou visant à saper et à discréditer les exigences justes de la Russie de garanties de sécurité ainsi qu'à justifier les aspirations géopolitiques occidentales et l'aménagement militaire du territoire de l'Ukraine.

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Sans surprise, le ton de toute cette campagne est donné par les médias les plus cités des États-Unis. Les publications ont un ton délibérément expressif. Dans une publication du Washington Post du 25 janvier 2022, David Ignatius écrit: "Des missiles et avions russes frapperont probablement des cibles en profondeur du territoire de l'Ukraine et Kiev ripostera en essayant de tuer le plus rapidement possible le plus grand nombre possible de soldats russes dans les combats frontaliers." On ne laisse pas le lecteur douter de la justesse de la publication en présentant la situation comme si "tout est déjà décidé". Andrew Kramer du New York Times (publication du 22 janvier 2022) poursuit cette tendance en interprétant de manière déformée les manœuvres des forces armées russes menées par notre pays sur son propre territoire (cette ruse est devenue parmi les essentielles dans cette campagne): "Moscou a commencé à accumuler des forces de sorte que cela indique la présence d'un plan d'invasion de l'Ukraine via le territoire biélorusse. Kiev craignait également que Minsk puisse organiser une provocation, par exemple, en envoyant des migrants à la frontière avec l'Ukraine, comme il l'avait fait avec la Pologne, s'assurant ainsi un prétexte pour déclencher la guerre. Les craintes concernant une éventuelle invasion depuis la Biélorussie se sont renforcées cette semaine, car la Russie projette dans ce pays ses forces et matériel en prévision des exercices conjoints prévus pour février."

L'agence de presse Bloomberg étroitement liée à l'establishment politique américain assume un rôle particulier dans le cadre de cette activité. Ce média s'est distingué deux fois récemment par des fakes intentionnels infondés qu'il a fallu démentir au plus haut niveau. Peu de temps avant la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Pékin 2022, Alberto Nardelli écrit sur le site de l'agence: "Peut-être que pendant un récent entretien avec Poutine Xi lui a demandé de ne pas lancer l'invasion de l'Ukraine pendant les Jeux, c'est ce qu'a dit un diplomate travaillant à Pékin qui a voulu garder l'anonymat." L'Ambassade de Chine à Moscou a déclaré immédiatement après la publication que c'était une provocation flagrante et un mensonge, la publication a été démentie par le porte-parole du Président russe Dmitri Peskov et la porte-parole du Ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova. Une autre publication de l'agence a été véritablement dangereuse: dans la nuit du 4 au 5 février, le site de Bloomberg a publié l'information "En direct: la Russie envahit l'Ukraine". Puis la rédaction a fait une déclaration spéciale que le communiqué sur l'invasion était une "erreur". Comme l'indiquent des experts indépendants, une telle nouvelle, si elle avait été relayée, aurait pu non seulement faire effondrer l'économie de plusieurs pays, mais également avoir de graves conséquences géopolitiques pour le monde entier.

Certains fakes de médias américains viennent tout simplement de nulle part, mais sont rédigés dans les pires traditions de propagande et ne sont rien d'autre que de la manipulation. C'est notamment le cas de la publication sur le site de la chaîne CNN du 7 février 2022 de la correspondante Natasha Bertrand sur une interception des négociations des représentants officiels russes: "Les messages interceptés par les États-Unis, selon des sources informées, ont montré que certains représentants officiels russes étaient préoccupés par le fait qu'une invasion de l'Ukraine à grande échelle serait plus difficile et coûteuse que ne le pensent le Président russe Vladimir Poutine et d'autres responsables du Kremlin".

Après les États-Unis, le deuxième champ médiatique le plus actif est celui de l'Allemagne, un allié important des États-Unis dans l'Otan et une "locomotive" de l'UE. Le journal populaire Bild, plus exactement son auteur Julian Roepcke, a été choisi pour le rôle d'exécuteur principal. C'est lui qui a publié le 3 décembre 2021 sous l'intitulé "C'est ainsi que Poutine pourrait détruire l'Ukraine" une prétendue "carte d'invasion" de l'Ukraine en décrivant les plans des forces armées russes: "La première phase, Sud, prévoit une attaque des régions au sud de l'Ukraine afin de couper le pays de la mer et assurer les livraisons en Crimée. En parallèle avec la première phase de la guerre, les forces armées et les missiles de Poutine affaibliront le potentiel militaire de l'Ukraine sur tout le territoire du pays. La deuxième phase, Nord-Est, doit se dérouler en parallèle avec la première et consiste à affaiblir la capacité défensive ukrainienne avec des frappes de missiles. La troisième, Kiev, prévoit une offensive contre la capitale ukrainienne par le nord. En avançant "approximativement jusqu'à la ligne Korosten-Ouman, l'armée russe forcera Kiev à capituler." De toute évidence, Julian Roepcke a été chargé de "superviser" ce thème. Au moins quatre de ses publications ont été faites dans le Bild, notamment le 5 février 2022, où le journaliste allemand parle des plans de la Russie par rapport à l'Ukraine: "L'attaque de la Russie contre l'Ukraine n'a pas encore commencé, mais les renseignements disposent déjà d'informations sur les actions de Poutine en période après la grande guerre et sur le régime fantoche brutal que le Kremlin voudrait instaurer en Ukraine. Les renseignements ont appris les projets russes pour l'après-guerre en Ukraine. Étape 1 - Capitulation des villes. Étape 2 - Réunion de "l'Assemblée populaire". Étape 3 - État d'urgence." 

De nombreux médias britanniques qui publient souvent des informations sur "l'invasion", utilisent les mêmes moyens rhétoriques que leurs collègues au sein de l'Otan: ils recourent aux épithètes comme "imminent" (Le Daily Mirror, le 5 février 2022, Dan Warburton: "Plus de 100 militaires britanniques d'élite ont été envoyés en Ukraine en raison des craintes d'une invasion russe imminente"), font preuve d'une représentation unilatérale des faits (Le Guardian, le 7 février 2022, Andrew Roth: "Des chars, des chars et des chars: les Russes continuent le renforcement militaire à la frontière de l'Ukraine") et utilisent la méthode d'épouvantail rhétorique en présentant les exercices militaires des troupes russes et biélorusses comme une preuve de l'existence d'un plan d'invasion de l'Ukraine (Le Daily Express, le 8 février 2022, Millie Cooke: "Poutine prépare une invasion de l'Ukraine avec 140 navires et 10.000 militaires, la plus grande mission depuis 1991"). 

En ce qui concerne ce dernier outil, il a été surtout utilisé par les médias suisses, notamment la chaîne de télévision SRF de ce pays prétendument neutre. David Nauer, correspondant de ce média à Moscou, affirme dans un reportage publié le 28 janvier, que "la Russie transfère des forces énormes vers la frontière ukrainienne. Des véhicules militaires, y compris des chars, ont été transportés à des milliers de kilomètres, depuis la Sibérie". Il est à noter que ce reportage utilise en qualité d'illustration des images des manœuvres effectuées sur des terrains d'entraînement des forces du District militaire du Sud, ce qui crée chez l'audience une impression mensongère de la concentration d'armes offensives à la frontière ukrainienne visant la mise en œuvre de plans agressifs de Moscou, qui n'existent que dans l'esprit des propagandistes occidentaux. 

Les publications des médias canadiens à ce sujet sont moins catégoriques, mais aussi nombreux (pratiquement quotidiens). Il est à noter que la presse canadienne abuse du droit d'expression des experts invités et présente toute agitation propagandiste en qualité d'"opinion" afin de se libérer de toute responsabilité pour la publication d'informations ouvertement mensongères. On peut citer en qualité d'exemple un article des chercheurs du McDonald Institute Marcus Kolga, Balkan Devlen et Richard Shimooka publié le 23 janvier 2022 par le Toronto Sun: "Les préparatifs militaires russes témoignent d'une invasion éventuelle. Les hostilités deviennent le plus en plus probables, et il ne reste apparemment que plusieurs semaines avant une offensive ouverte."

Les médias français, héritiers d'une longue tradition journalistique, publient des fake news dans leur propre style: ils utilisent des tournures littéraires et tentent de ne pas s'appuyer sur les faits, mais sur les images. On peut citer en qualité d'exemple le reportage de Guillaume Perrier, envoyé spécial du Point à Kiev, publié le 3 février 2022. L'article évoque le "bruit de bottes" à la frontière orientale de l'Ukraine qui favorise le rapprochement entre Kiev et l'Occident et pousse les Ukrainiens les plus courageux à prendre des armes. Guillaume Perrier offre également la parole à la députée ukrainienne Ivanna Klimpouch-Tsintsadze qui présente l'Ukraine "libre et démocratique" comme une avant-garde qui fait face au monde russe et assure la sécurité européenne. Selon elle, il est temps que les sociétés occidentales se réveillent. Le philosophe libéral de gauche Bernard-Henri Lévy s'attend quant à lui à un "bain de sang", selon son article publié par l'Express le 27 janvier 2022. Malgré leur goût de la littérature, les propagandistes français répètent volontairement les propos de leurs collègues allemands et analysent des "plans" de la Russie concernant l'Ukraine, obtenus de sources inconnues. Un de ces "plans" a notamment été présenté par l'Express, dans l'article de Paul Véronique du 3 février 2022. Ce dernier évoque "les cinq scénarios d'une possible invasion russe": "l'invasion complète de l'Ukraine", "reconstituer la "Novorossia" de l'époque impériale", "établir la jonction terrestre entre Crimée et Donbass", "le renversement ou l'élimination du président Zelensky", "la solution diplomatique".  Il est à noter que cette "analyse" (tout comme celle du journaliste allemand Julian Röpke à Bild) est muni d'un grand nombre d'images présentées sous forme d'infographie. 

Nous constatons également que cette campagne médiatique prend en considération l'audience de tel ou tel média. Les médias belges en sont un bon exemple. Ainsi, le quotidien De Standaard, orienté à un public très large, a publié le 3 février 2022 un article de Peter De Lobel qui mettait en œuvre - sans beaucoup de détails, mais de manière très expressive - les instructions politiques basées sur les propos américains: "Moscou a envisagé d'utiliser une vidéo factice comme un prétexte de l'invasion. Le plan de préparer une vidéo factice montrant une attaque de militaires ukrainiens correspond parfaitement à la guerre propagandiste, menée déjà depuis un certain temps par la Russie." Ses collègues propagandistes de l'Echo avancent eux aussi leurs fantaisies au sujet d'une invasion éventuelle de la Russie, sans présenter aucune preuve de leurs spéculations, tout comme leur collègues allemands et français (un article du 31 janvier 2022): " Trois scénarios sont envisagés en cas d’attaque de la Russie. Le premier, le plus clair, est l’invasion totale de l’Ukraine. Il suffirait à l'armée russe d'une semaine ou deux pour prendre le pays, disent la plupart des experts. Après, une guérilla s'installerait. Le risque d'un embrasement du conflit à l'échelle européenne n'est pas exclu. (…) Berdiansk, aux bords de la mer Noire, fait partie des villes stratégiques que la Russie pourrait envahir pour effectuer la jonction entre la région du Donbass, occupée par les forces pro-russes, et la Crimée, annexée illégalement par Moscou en 2014. Cette jonction, c’est le deuxième scénario d’une attaque russe. Il est jugé très probable par les analystes. (…)Nous pensons que Moscou pourrait chercher à accroître son contrôle sur les territoires de l’est, le Donetsk et le Lougansk, en les occupant définitivement. C’est le troisième scénario."

Quant au média européen EU Observer, orienté aux lecteurs du hub international de l'UE à Bruxelles, il a avancé le 26 janvier des arguments compliqués en faisant preuve d'une tentative, assez dénaturée, de comprendre les "motifs" de la Russie dans la "future" invasion: "Un schisme émotionnel en Europe. Alors que les États d'Europe de l'Est craignent le retour de l'impérialisme russe, un Européen lambda estime visiblement que la Russie résiste toujours à l'impérialisme présumé des États-Unis. Il s'est avéré que l'Occident a dans une grande partie ignoré les préoccupations de Moscou en élargissant l'UE, l'Otan et son influence militaire. La Russie a été humiliée et ne veut que sa place sous le soleil. Même si l'UE bénéficie aujourd'hui d'une attitude positive en Biélorussie, en Moldavie et en Ukraine, la réalité est que la souveraineté de ces pays a été grandement compromise par Moscou. La Biélorussie fait partie de l'Union avec la Russie et de l'OSTC, "Otan russe". Des forces de paix russes se trouvent toujours à l'est de la Moldavie. Des soldats russes sont présents à l'est de l'Ukraine et en Crimée." Le message est dans tous les cas le même: la Russie prépare une invasion d'un État voisin. 

Le fait que les médias des pays de la même région utilisent souvent les mêmes thèses indique que la campagne médiatique de désinformation est coordonnée et contrôlée. Ainsi, le journaliste Maris Antonevics (Lettonie) trace dans le journal Latvijas Avize des parallèles historiques émotionnels (et absolument déplacés): "La nouvelle rappelle une fois de plus ce qu'on appelle l'incident de Gleiwitz, qui a servi de prétexte à Hitler en 1939 pour attaquer la Pologne et déclencher la Seconde Guerre mondiale. Les nazis ont accusé la Pologne d'avoir capturé la station de radio dans la ville frontalière de Gleiwitz et de diffuser des appels contre l'Allemagne. Cela a été initialement pris pour une provocation mal dissimulée, ce qui a été confirmé par la suite par des faits - l'attaque était une opération secrète planifiée par les hitlériens baptisée Conserve (opération Himmler). C'est ainsi qu'étaient désignés les corps vêtus en uniforme polonais et abandonnés près de la station de radio pour donner l'impression qu'ils ont été tués pendant l'attaque." C'est comparable aux mentions du journaliste Varik Lauri se référant à Kalev Stoicescu, chercheur du Centre d'études pour la défense, publiées que le site ERR.ee (Estonie) le 17 janvier 2022: "Selon certaines informations, la Russie a envoyé des saboteurs dans la région. Nous avons vu dans l'histoire des scénarios quand l'URSS a envahi la Finlande en novembre 1939 ou quand Hitler a attaqué la Pologne en septembre 1939."

Les Baltes (notamment la chaîne TV3 de Lituanie) spéculent également sur les craintes de la minorité russophobe de la population de la région sur le fait que l'attaque contre l'Ukraine ne serait qu'une couverture pour une vaste occupation des territoires lituaniens: "La Russie peut très facilement réaliser une telle manœuvre - entrer de 30-50 mètres sur notre partie de l'isthme de Courlande, occuper cette zone et voir ce qui arrivera ensuite. Qu'en est-il de la cohésion de l'Otan, combattrons-nous pour ce territoire?" (émission du 5 février 2022).

Dans l'ensemble, l'agenda médiatique antirusse d'un autre pays d'Europe de l'Est, La Pologne, est devenu un terrain fertile pour pratiquer la majorité des moyens mentionnés d'induire en erreur les spectateurs et les lecteurs concernant les projets de Moscou. L'agence de presse polonaise Polska Agencja Prasowa a publié le 18 janvier 2022 sur son site la "carte", après son illustration par la presse allemande, où étaient indiqués les "axes potentiels de l'invasion russe en Ukraine". Comme dans certains autres États, l'accent est mis sur la rubrique "Opinion". La Poslkie Radio publique a accordé une tribune le 30 janvier 2022 à l'analyste de l'Institut d'études militaires Michael Clarke, qui a déclaré que l'invasion était une "question de semaines, et non de jours". Un autre site polonais, Onet, a rapporté le 2 février 2022 se référant également à des analystes de Washington: "La Russie n'a pas encore tous les éléments en place, elle les déplace actuellement. Ils seront probablement tous déployés d'ici le 9 février. C'est à ce moment que l'escalade est la plus probable." Les médias polonais sont devenus dans l'ensemble une plateforme de propagation de spéculations et de fakes américains. À noter que c'est le média public polonais Polska Agencja Prasowa qui, dans la publication du 7 février 2022, relaye presque entièrement le communiqué mentionné de CNN sur une prétendue "interception des communications des militaires russes par les renseignements américains". 

Une telle tactique (dans l'esprit du docteur Goebbels, "un mensonge répété mille fois devient vérité", autrement dit, la légalisation par la répétition) est utilisée dans l'espace médiatique de plusieurs pays d'Europe de l'Est, notamment en Roumanie. Le site d'actualité Digi 24 a accordé, dans un reportage du 3 février 2022, beaucoup d'attention aux suppositions du Département d'Etat américain (exprimées plus tôt pendant une conférence de presse de Ned Price) que "les renseignements russes fabriquent une vidéo où ils mettent en scène une attaque contre les Ukrainiens avec des acteurs. Les forces ukrainiennes seront accusées d'attentat faisant des victimes non seulement dans l'est de l'Ukraine, mais également en Russie". Alors que le journaliste Eugen Cismasu (site Podul.ro, article du 4 février 2022) poursuit sur le thème des vidéos en ajoutant de nouveaux détails: "Plusieurs vidéos publiées sur les réseaux sociaux indiquent que ce mois-ci des militaires tchétchènes se dirigent en convoi et avec enthousiasme en direction de l'Ukraine. La vidéo montre une colonne de véhicules blindés du régiment d'infanterie Nord (Severny). En même temps, la Garde russe poursuit le déplacement des forces vers la zone frontalière de l'Ukraine."

Il existe également des cas d'imposition directe de l'agenda déterminé à Washington par les représentants officiels américains. Ainsi, l'Ambassadrice des États-Unis au Monténégro Judy Rising Reinke a écrit le 3 février 2022 dans plusieurs quotidiens monténégrins (Dan, Pobjeda, Vijesti) son article consacré à la Russie pour réitérer l'éventail habituel d'accusations infondées visant Moscou: "Les actions de la Russie représentent une menace non seulement pour l'Ukraine, mais également pour l'Europe et l'ordre international basé sur des règles. Ces vingt dernières années, la Russie a envahi deux pays voisins, s'est ingérée dans les élections étrangères, a utilisé l'arme chimique pour commettre des assassinats sur le territoire d'autres pays, a utilisé les livraisons de gaz comme instrument politique et a enfreint les accords internationaux sur la maîtrise des armements. Contrairement à la Russie, l'Ukraine a tenu ses engagements dans le cadre des Accords de Minsk, appelés à assurer le cessez-le-feu dans le Donbass. Ce que Poutine craint vraiment, c'est que les valeurs démocratiques et le respect des droits de l'homme continuent d'affaiblir sa gouvernance."

Les Américains ont fait la même chose dans d'autres pays: au Portugal, en Macédoine du Nord, ainsi que sur le territoire autonome du Kosovo: l'Ambassadrice des États-Unis à Skopje Kate Marie Byrnes, la chargée d'affaires par intérim des États-Unis à Lisbonne Kristin Kane et le représentant des États-Unis à Pristina Jeff Hovenier ont publié entre les 4 et 7 février 2022 des articles avec le même titre ("La diplomatie, pas la guerre, la vérité est au-delà du mensonge") qui ont été relayés par les médias nationaux, notamment par l'agence de presse MIA (Macédoine du Nord) et le journal Diario de Noticias (Portugal) pour les lecteurs locaux. Les thèses de propagande occidentales connus se résument à ceci: "Le monde suit l'agression non provoquée de la Russie contre l'Ukraine". On ne cite aucun argument raisonnable qui tiendrait debout face à la référence au droit des États de déplacer leurs troupes dans les frontières de leur territoire, en revanche il y a une liste de menaces sous la forme d'une liste très conséquente de sanctions contre la Russie.

Les médias d'un autre pays de l'Otan, la Norvège, ont mis l'accent sur les détails purement militaires et techniques en donnant l'impression que de sérieux experts ayant un accès aux informations confidentielles ont participé à la préparation des publications. Le 31 janvier 2022, le site Aldrimer.no a écrit, sous la plume de Kjetil Stormark, sur de prétendues informations à disposition des Norvégiens sur "la projection des troupes vers les territoires russes proches de la Norvège", supposant qu'elles se dirigeront vers l'Ukraine: "La Russie procède à une importante projection des forces depuis la péninsule de Kola vers le sud, probablement pour renforcer les forces à la frontière ukrainienne. C'est une mauvaise nouvelle à la fois pour la stabilité au nord que pour l'Ukraine. Les analystes militaires pensent que les images montrent probablement des unités du 200e détachement d'infanterie mécanisé et de la 61e brigade d'infanterie de marine déployées près du village de Petchenga à quelques kilomètres de la frontière russo-norvégienne." Le journal Verdens Gang a écrit le 20 janvier 2022 se référant directement au chef des forces terrestres de l'Académie militaire de Norvège, lieutenant-colonel Palle Ydstebo: "La Russie possède une telle domination en termes d'aviation, de drones et d'artillerie qu'elle pourrait détruire la majeure partie de la défense ukrainienne. L'attaque sera "sale" et sanglante. La Russie possède sur le territoire du Donbass des conseillers militaires, de la reconnaissance et certaines unités spéciales."

En même temps, les publications d'un autre pays de l'Otan ont un autre caractère, presque curieux: le journaliste Mette Borre parle sérieusement dans le quotidien du Danemark Jyllands-Posten (article du 5 février 2022) de la possibilité d'une attaque de la Russie contre l'Ukraine via le territoire d'exclusion autour de la centrale nucléaire de Tchernobyl.

En Islande, les médias locaux se sont concentrés sur les fakes sur la "cyberactivité" de la Russie en Ukraine. Les publications du journal Frettabladid du 14 janvier 2022 contiennent les spéculations suivantes: "Les hackers russes ont attaqué plusieurs fois l'Ukraine, et il existe une forte tension entre les deux pays. Les hackers ont provoqué des coupures d'électricité sur une grande partie du territoire du pays en hiver 2015, ce qui a laissé presque 250.000 personnes sans chauffage ni électricité. Une attaque similaire a été commise en 2016. C'était supposément des hackers russes. En 2017, les banques, les agences de presse et les grandes entreprises ont été touchées par un virus derrière lequel se trouveraient des hackers russes." À noter que d'autres sortes de fausses informations qui apparaissent dans les médias islandais étaient rapidement retirées par les rédacteurs, comme ce fut le cas du reportage de la chaîne RUV du 15 janvier 2022 sur de prétendus projets de la Russie d'envoyer en Ukraine un "groupe de vandales" pour organiser des provocations et justifier "l'invasion" militaire.

Le thème de la "cybersécurité" dans le contexte de la "future guerre en Ukraine" préoccupe également les journalistes des Pays-Bas. Si "l'invasion physique" est reportée par les médias locaux se référant aux médias de propagande occidentaux (Bloomberg, CNN, etc.), la chaîne NOS du 25 janvier 2022 (émission Nieuwsuur) a consacré un fake à part au thème des "hackers", et ce, en lien avec leur propre État. 

Les médias du Luxembourg, avec des capacités médiatiques très limitées du Grand-Duché, mènent leur campagne à bas niveau, en relayant les articles de la France et de l'Allemagne voisins. Et lorsqu'un journaliste local se met à exécuter un ordre politique, tout se limite aux réflexions russophobes sans la moindre allusion à la politique. Il est possible de citer à titre d'exemple l'article de Françoise Hanff dans le quotidien Luxemburger Wort du 25 janvier 2022: "Selon les observateurs, Vladimir Poutine n'a pas encore décidé s'il envahira l'Ukraine. Il est évident qu'il souhaite plus que simplement rétablir l'ordre chez ses voisins désobéissants. Le chef du Kremlin prévoit de réorganiser l'architecture de la sécurité européenne, avec des zones d'influence, comme à l'époque de la guerre froide."

La structuration du discours est simplifiée dans les pays qui ont visiblement moins d'importance pour Washington et l'Otan du point de vue de la mise au point de l'agenda médiatique mondial sur l'Ukraine. Ainsi, les médias en Italie, en Espagne, en Slovénie, en Bulgarie, en Grèce et en Croatie, même s'ils ont accordé une certaine attention au thème de "l'invasion", dans l'ensemble ils se sont contentés de relayer les médias américains (notamment les communiqués de l'agence Bloomberg). Les agences de presse nationales s'abstiennent évidemment de publier des points de vue alternatifs, malgré les normes universelles du journalisme.

Outre leurs alliés au sein de l'Otan, les États-Unis ont influé de manière indirecte sur le champ médiatique d'autres régions importantes pour Washington. Ainsi, les médias finlandais ont non seulement retransmis des nouvelles occidentales, mais aussi ont utilisé la stratégie de "prévisions", déjà testée en France et en Allemagne. Le journal Ilta-Sanomat a publié le 22 janvier 2022 un article de Jari Alenius sur les scénarios de l'évolution des événements autour de l'Ukraine. Il est à noter que le journaliste finlandais avance cinq scénarios, tout somme ses collègues: "Si Poutine décidait que ses actions fermes ne pouvaient pas prévenir l'occidentalisation de l'Ukraine et son adhésion éventuelle à l'Otan, et que cela constituait une menace pour la Russie, il aurait plusieurs options militaires impliquant son armée déjà concentrée à la frontière ukrainienne. Il existe cinq scénarios. Le premier concerne l'Ukraine de l'Est que Poutine pourrait occuper à l'aide des forces de maintien de la paix prétendues - nous les avons récemment constaté au Kazakhstan - pour commencer ensuite à occuper des parties de l'Ukraine et à élargir le territoire des séparatistes. La deuxième option prévoit un affrontement militaire direct. La Russie lancera son agression militaire de loin. Elle tentera d'abord de frapper sur des unités, des pièces d'artillerie, des bases aériennes et des centres de commandement de l'armée ukrainienne situés dans le rayon d'action de l'artillerie et des missiles stationnés du côté russe de la frontière. Les missiles balistiques tactiques Iskander seront l'arme le plus redoutable dans ce contexte. Le troisième scénario prévoit une offensive russe vers l'est et l'ouest de l'Ukraine depuis la Crimée. Si la Russie poursuivait son offensive et débarquait ses troupes à Odessa, elle pourrait également accéder au territoire de la Transnistrie et priver l'État ukrainien de l'accès à la mer. Parmi les scénarios les moins plausibles on peut citer une offensive russe depuis le nord et l'est visant à établir une nouvelle frontière le long du Dniepr voire à occuper toute l'Ukraine. La dernière option ne serait possible que si Poutine voulait également prendre la Biélorussie pour former un ordre mondial absolument nouveau en Europe." L'article se réfère naturellement à NBC, au Guardian et à plusieurs études occidentales. 

Nous constatons une situation similaire dans les médias suédois. Leurs articles évoquant une "invasion imminente/probable de l'Ukraine par la Russie" citent souvent des médias américains ou britanniques (CNN, BBC etc.), voire constituent une traduction directe de publications anglosaxonnes. La champ médiatique suédois se caractérise par la fréquence de ces citations. La plupart des quotidiens réputés du Royaume (Expressen, Dagens Industri, Aftonbladet, Svenska Dagbladet) publient régulièrement des affirmations sur les préparatifs russes d'une invasion de l'Ukraine. Ce sont les Suédois qui ont largement cité - hors du Royaume-Uni - les fakes news de la diplomatie britannique sur la formation d'un gouvernement ukrainien fantoche à Moscou (Aftonbladet, le 23 janvier 2022, Johan Edgar: "Selon les informations existantes, Poutine envisage un coup d'État en Ukraine qui devrait mettre au pouvoir des dirigeants prorusses"). 

Hors du continent européen, il faut surtout souligner l'activité des médias australiens et japonais. Dans le premier cas, les médias locaux (notamment la chaîne Sky News) ont utilisé les informations de leurs collègues britanniques sans rien ajouter à l'exception d'éléments conformes à la politique de Londres. Qui plus est, plusieurs médias (le quotidien l'Australien ou le site News.com.au) se sont focalisés sur les fake news sur l'augmentation des réserves de sang des structures médicales des unités de l'arrière du District militaire du Sud: il s'agit des articles de Maria Bervanakis du 2 février 2022 et d'Alexis Carey du 1er février 2022. En ce qui concerne les médias japonais, plusieurs journalistes (Yuichi Onoda de Sankei et H. Siroki de FNN Prime Online) tracent des parallèles familières, mais erronées du point de vue des faits à la situation de 2008, caractérisée par une hausse des tensions à la frontière russe dans le contexte des Jeux olympiques de Pékin: "En août 2008, un conflit armé est survenu à l'ouest de la Géorgie prooccidentale, sur le territoire de l'Ossétie du Sud prorusse, entre les forces gouvernementales et les habitants de la région. La Russie, qui avait plus tôt offert sa nationalité aux habitants de l'Ossétie du Sud, a envahi la Géorgie sous prétexte de la protection de ses citoyens." 

Les experts médiatiques locaux ont également recouru à la démonstration des "cartes d'invasion", une méthode très efficace, selon les artisans de cette campagne de désinformation. Ainsi, une émission de Nippon TV, une des principales chaînes de télévision du pays, a été consacrée le 1 février 2022 au sujet suivant: "Les tensions autour de l'Ukraine. Trois directions de l'offensive des troupes russes. Les estimations d'experts américains". L'émission s'appuyait sur les informations du Center for Strategic and International Studies et savourait des affirmations manifestement fausses sur les préparatifs russes d'une invasion de l'Ukraine depuis trois directions possibles: "Examinons en détail le plan d'attaque des troupes russes en Ukraine." 

 

 

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Il faut également attirer une attention spéciale à la position des responsables des pays occidentaux dans le contexte de la campagne de désinformation massive contre la Russie. Ces derniers évitent par tous les moyens de la qualifier de ce qu'elle est, en confirmant ainsi leur implication dans les fake news. Les propos de Peter Stano, porte-parole du service diplomatique de l'UE, sur les fake news de Bloomberg sur le début prétendu d'une "invasion russe de l'Ukraine", sont surtout éloquents dans ce contexte. 

Même après la reconnaissance officielle de ces désinformations par leur source, ce responsable européen, interrogé par les médias (il était évidemment hors de question pour lui de commenter la situation de son propre gré), les a qualifiées d'une "erreur à vie courte". Autrement dit, il a reconnu l'existence d'une fraude évidente, mais a tenté de la justifier par l'absence de répercussions. 

Tout ces faits suggèrent l'existence d'une complicité entre les autorités et les médias occidentaux visant à créer une escalade artificielle autour de l'Ukraine à l'aide de fake news massifs et coordonnés pour desservir leurs intérêts géopolitiques et détourner l'attention de leurs propres actions agressives. 


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