Discours du ministre des Affaires Etrangères de la Russie Sergey Lavrov lors de la réunion des chefs de bureau et des représentants de Rossotrudnitchestvo à l'étranger. Moscou, le 9 juillet 2014
Chers collègues et amis,
Je suis heureux de prendre la parole à cette réunion des chefs de bureau et des représentants de l'agence Rossotrudnitchestvo à l'étranger. Je suis sûr que les résultats de votre travail seront importants pour la poursuite de nos efforts dans les domaines correspondants de la politique étrangère.
La dernière fois, nous nous sommes réunis dans ce format en septembre 2012. Dans le contexte difficile actuel, marqué par l'accumulation de conflits potentiels et d'éléments porteurs d'une crise dans les affaires internationales, une discussion de fond sur un large éventail de questions liées à notre travail dans le domaine de la 'soft power' est plus que d'actualité.
Il y a une semaine, lors d'une réunion des ambassadeurs et des représentants permanents à l'étranger, le président russe Vladimir Poutine a souligné que la situation internationale évolue rapidement et de façon de plus en plus imprévisible. Ce fut particulièrement le cas en Ukraine, où un coup d'état s'est produit en février dont les conséquences ont fait peser une menace sur nos compatriotes, le peuple russe et d'autres nationalités qui s'associent avec le monde russe et qui veulent toujours faire valoir leurs droits à la langue russe, à l'histoire et la culture, tout simplement, leurs droits légitimes au sein de l'état ukrainien.
Vous savez quelles sont les mesures que nous sommes en train de prendre en conformité avec la ligne déterminée par le président de la Russie, afin de parvenir à un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel et de créer les conditions pour que débute un véritable dialogue national en Ukraine sur les moyens de sortir de la crise en tenant compte des intérêts et des aspirations légitimes des habitants de toutes les régions du pays.
En même temps, les événements en Ukraine et autour d'elle, ont clairement démontré que nous sommes confrontés à une concurrence croissante, et souvent déloyale, en matière de façonnement de l'opinion publique. Des efforts sans précédent sont déployés afin de discréditer la politique russe et de déformer l'image de notre pays. Par conséquent, l'organisation intelligente et mûrement réfléchie de toutes nos activités revêt une importance particulière. Il est important de développer des efforts visant à expliquer la politique russe dans les affaires internationales et de porter les informations véridiques à la connaissance du public étranger, à renforcer les contacts non seulement avec ceux qui sont disposés à coopérer avec nous de façon constructive, mais également avec des acteurs qui sont encore sous l'influence des préjugés d'une époque révolue. Rossotrudnichestvo et ses bureaux dans ces pays sont appelés à jouer un rôle important dans la solution de ces problèmes.
Depuis la dernière réunion en septembre 2012, un certain nombre de décisions importantes qui concernent les activités de l'Agence a été adoptées. Je vais en mentionner quelques-unes. Le décret présidentiel du 8 mai 2013 a validé une liste de bureaux existants de l'agence Rossotrudnitchestvo à l'étranger et une liste des villes où il est prévu d'ouvrir de telles représentations. Le concept renouvelé en matière de politique étrangère, qui a été approuvé par le président russe Vladimir Poutine en février de l'an dernier, a mis l'accent sur l'importance particulière d'assurer une perception objective de la Russie, de promouvoir la langue russe et la consolidation de la diaspora russe à l'étranger, afin de mieux protéger les intérêts de nos compatriotes dans leur pays de résidence. Comme l'a confirmé le président Vladimir Poutine, nous allons continuer à défendre vigoureusement les droits des russes, de nos compatriotes à l'étranger, en utilisant pour cela tous les moyens légitimes disponibles.
Parallèlement, nous allons continuer à expliquer à nos partenaires étrangers que la présence de la communauté russe dans leur pays est un facteur important pour le renforcement de nos relations bilatérales, mutuellement bénéfiques, dans différents domaines.
La situation de la langue russe devrait rester au coeur de nos efforts. Au niveau de l'Etat, un certain nombre de mesures pertinentes est en train d'être effectuées. Le 9 juin 2014, le Conseil de la langue russe auprès du Président de la Fédération de Russie a été crée. Parmi ses tâches principales, citons la préparation des propositions visant à définir les priorités et les mécanismes pour le développement, la protection et la promotion de la langue russe dans notre pays et à l'étranger, l'évaluation de la mise en oeuvre de programmes et de projets visant à renforcer la position de la langue russe dans le monde, l'expansion géographique et l'élargissement de ses champs d'utilisation, ainsi que le soutien des communautés russophones à l'étranger. Le programme fédéral 'Langue russe' pour la période 2011-2015 est en cours. Par un décret présidentiel, l'an prochain est déclaré 'Année de la littérature' dans notre pays.
Les activités de l'agence Rossotrudnitchestvo et des centres scientifiques et culturels russes, dont la plupart dispensent des cours de la langue russe, contribuent à ces efforts. Le fonds 'Le monde russe' ouvre ses antennes et donne des cours de langue russe auprès des établissements d'enseignement locaux. Toutefois, il faudra aller plus loin et plus vite pour pouvoir répondre de façon efficace à la demande croissante.
La nécessité d'améliorer le prestige de l'éducation nationale et d'attirer des étudiants étrangers dans nos universités reste d'actualité. C'est un atout important dans nos efforts d'élargissement du cercle de nos amis à l'étranger. Il est important de rester concentré sur le travail avec les associations de diplômés, pour qui la possibilité de communiquer en russe, de participer à des projets communs avec notre pays, est indispensable à leur épanouissement personnel et leur permet de déployer au mieux leurs talents multiples.
Je considère qu'il est important d'intensifier l'engagement avec la société civile, de contacter les leaders d'opinion, les organisations non gouvernementales, les médias et les communautés d'experts intéressés par le développement des relations avec la Russie. Après tout, dans le monde d'aujourd'hui, beaucoup de gens sentent une sympathie sincère pour notre pays, pour sa grande culture et ses valeurs traditionnelles.
Il faudra réfléchir à la manière de soutenir davantage les efforts des ONG russes actives sur la scène politique et qui visent à développer leurs partenariats avec les institutions non gouvernementales étrangères intéressées.
L'idée de la création de fonds publics-privés pour coordonner le travail des sociétés 'des Amicales', des associations d'anciens, de la presse de langue russe, de mouvements de jumelage doit être également développée.
Au cours des dernières années, de nouvelles directions se sont profilées dans notre travail. Tout d'abord, nous parlons de l'aide au développement international. Un décret présidentiel du 8 mai 2013 a cimenté le rôle du segment russe de l'aide au développement international (ADI) sur une base bilatérale comme la principale orientation des activités dans ce domaine, et l'agence Rossotrudnitchestvo, étant l'organisme responsable, a été dotée de pouvoirs appropriés. Le décret présidentiel du 20 avril 2014 a approuvé un nouveau concept de politique de l'état de la Fédération de Russie dans le domaine de l'aide au développement international. Je vous encourage à vous familiariser rapidement avec ce sujet, pour pouvoir, sans tarder, s'atteler à la phase pratique.
L'orientation stratégique de la politique étrangère de la Russie, conçue pour le long terme, est de renforcer les relations étroites et amicales et la coopération mutuellement bénéfique au sein de la CEI. La force motrice derrière ce processus d'intégration est la 'troïka' constituée de la Russie, de la Biélorussie et du Kazakhstan. Signé par les trois pays le 29 mai dernier à Astana, le traité sur l'Union Economique Eurasienne (CEEA), qui sera créé à partir du 1er janvier 2015, marque un tournant dans l'évolution. En effet, nous sommes en train d'assister à la formation d'un centre puissant de développement économique, d'un large marché commun qui le rend, à juste titre, attrayant pour les partenaires de la CEI. Dans le futur proche, l'Arménie deviendra membre de la CEEA et des négociations soutenues sont en cours avec le Kirghizstan. Il y a également d'autres pays de la CEI qui souhaitent y adhérer. D'où la nécessité d'accorder une attention particulière à une oeuvre créatrice et proactive, de promouvoir la coopération humanitaire multiforme au sein du Commonwealth, qui viendra appuyer l'intégration économique.
Dernièrement, Rossotrudnitchestvo et ses missions à l'étranger ont accompli un travail remarquable. Nous l'apprécions. Nous sommes au courant des problèmes qui restent à résoudre, notamment en matière financière et de ressources, et nous nous efforçons de faire en sorte qu'ils soient traités de façon cohérente. Ces questions font l'objet d'une attention particulière de la part du gouvernement. Une décision en ce sens a été adoptée, en vertu de laquelle doivent être réglées les questions d'une rémunération décente du travail des salariés de Rossotrudnitchestvo en Russie comme et à l'étranger, ainsi que d'une augmentation significative du financement des activités dans le cadre des projets de l'agence.
Je suis convaincu que vous serez en mesure d'accomplir honorablement les tâches nouvelles qui vous ont été confiées. Bien que complexes et ambitieuses, elles restent faisables. Bien sûr, le ministère des Affaires étrangères et nos missions à l'étranger continueront à appuyer pleinement les activités de Rossotrudnitchestvo et de ses bureaux à l'étranger. La clé du succès de nos efforts conjoints est dans une fusion antre les traditions séculaires des services à la patrie et les méthodes créatives de travail les plus modernes.
Merci pour votre attention.
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Cher Konstantin,
Chers amis,
Au cours des deux dernières décennies, nos partenaires occidentaux ont investi beaucoup d'argent et d'efforts, en particulier sur le territoire de la CEI, afin d'y renforcer leurs positions. A présent, ils attendent sans doute un retour sur investissement.
Il va de soi que nous devons continuer à investir dans le développement des relations d'amitié et de coopération avec nos pays frères et leurs peuples. Mais n'oublions pas que, non seulement pendant les vingt dernières années, mais depuis des décennies (voire des siècles) la Russie a investi ses efforts et ses ressources financières dans l'éducation et l'économie réelle des nations qui vivaient à nos côtés dans l'espace de la CEI, ainsi que dans le développement de leur culture, tout en respectant et en renforçant leur identité. Il serait donc justifié de tabler sur de nouveaux investissements à titre de gage du succès des travaux futurs. Mais il ne faut pas oublier que, dans le but de renforcer ses relations avec les pays de la CEI, la Russie a investi plusieurs fois ce qu'ont consacré tout autre pays.
Je pense que la combinaison de ce qui a été réalisé par nos prédécesseurs et ce qui en train d'être réalisé aujourd'hui par le gouvernement russe, devrait assurer le succès de nos efforts globaux, notamment de votre travail , dans ce domaine crucial.