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Intervention et réponses aux questions des journalistes de S.V. Lavrov, Ministre des affaires étrangères de la Russie, au cours du briefing à l’issu de la conférence internationale sur le problème de Syrie convoqué à l’initiative russe, Moscou, le 9 juin 2012

1158-09-06-2012

Chers collègues,

Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Ces derniers jours dans les médias on accumule trop d'horreurs sur la situation en Syrie et autour d'elle. A mon avis il est très important d'exposer le point de vue de la Russie sur ces événements.

La situation acquiert un caractère de plus en plus alarmant. L'impression est que le pays s'est approché au bord d'un conflit civil sur une large échelle. Inquiète également la réaction aux événements de la part de certains joueurs extérieurs, qui soutiennent ouvertement les formations armées de l'opposition, mais en même temps exigent de la communauté internationale des actions décisives au changement du régime dans la République arabe syrienne. Pour la première fois pendant toute la période de la crise on pose carrément et avec de l'émotion la question de l'intervention étrangère. En résultat – des gens continuent à périr. Pour beaucoup cela se passe parce que les joueurs extérieurs poussent l'opposition armée à occuper des approches intransigeantes, continuer les opérations, ce qui donne aux opposants un espoir à la répétition du scénario libyen. C'est un jeu très dangereux.

Notre position reste invariable – nous ne consentirons pas à l'autorisation dans le Conseil de sécurité de l'ONU du recours à la force, ce qui aboutirait aux conséquences les plus graves pour la région du Proche-Orient. J'espère qu'on en a tous assez des conséquences de la guerre en Irak, de la «démocratisation» de la Lybie, qui sont jusqu'à présent ressenties dans ce pays, au Mali et dans d'autres lieux. Il n'est pas clair quand auront lieu les élections plusieurs fois reportées en Lybie. Il ne faut pas créer de problèmes extrêmement sérieux encore au Liban, où ils commencent déjà à paraître. Je suis sûr que d'autres pays de la région ne resteront pas intacts dans le scénario catastrophique de l'application de la force externe pour la décision du problème syrien. Tout cela risque de créer un très grand arc d'instabilité de la mer Méditerranée jusqu'au golfe Persique. Je compte sur ce que les gens instruits le comprennent et réalisent la menace réelle de l'opposition entre sunnites et shiites dans la région. Je suis sûr que ce n'est pas l'avenir qu'on souhaiterait tous pour la région nommée le Grand Proche Orient. Nous voulons que les peuples des pays de cette région très importante dans le sens géopolitique vivent en paix et décident eux-mêmes leur destin.

La partie russe a maintes fois déclaré que tout gouvernement assume la responsabilité de ce qui se passe sur le territoire du pays. Les autorités de la Syrie ne font pas d'exclusion. Nous en avons parlé plusieurs fois, en indiquant directement sur de nombreuses erreurs, commises par les autorités syriennes au cours des événements, se développant pendant plus d'une année. Néanmoins quand l'information d'un acte de crime suivant apparaît – et à ce moment dans les conditions d'une déstabilisation importante de la situation en Syrie ces actes ont lieu pratiquement tous les jours – on entend immédiatement de la plupart des médias internationaux des appels d'imputer tout aux les autorités syriennes, de leur attribuer la responsabilité pour ce qui se passe. Evidemment, le Damas officiel assume la responsabilité essentielle pour tout ce qui se passe sur le territoire de la République arabe syrienne, car le gouvernement est responsable pour la sécurité de ses citoyens, pour l'assurance de leurs droits. Je ne pense pas qu'il y a encore un an quelqu'un ait pu s'imaginer que les crimes que nous voyons aujourd'hui soient possibles en Syrie. Je suis sûr, que le problème est, au minimum, pas seulement dans les autorités de la Syrie.

A la suite de l'affrontement qui est de plus en plus activement excité y compris par des forces externes, sont devenues possibles les tragédies à Houla, Kubeir, et beaucoup d'autres actes de violence, y compris les actes terroriste sensationnels désapprouvés par le Conseil de sécurité de l'ONU à Damas, Aleppo et d'autres villes. J'entends avant tout le soutien moral de la soi-disant opposition armée, son approvisionnement en argent, en armes, l'assistance à l'infiltration de combattants de pays voisins et autres en Syrie. Ces mêmes médias internationaux qui jusqu'à présent dans leurs évaluations se basent sur les informations de certaines chaînes régionales très connues et bien engagées, les actions des formations armées illégales sont présentées comme des «exploits héroïques de défenseurs des manifestants pacifiques», «combattants des valeurs humaines et des droits de l'homme». Je voudrais citer un nombre de faits qui témoignent du caractère réel de ces actions.

Hier (le 8 juin) on a tiré d'un lance-grenades sur un bâtiment situé dans l'arrondissement de Damas Tijar, où habitent des spécialistes russes. Une grenade a touché le mur du premier étage en causant un dommage au bâtiment. Par chance, il n'y pas de victimes. Ce n'est pas le cas unique du tir sur les institutions russes en Syrie. L'automne dernier on a attaqué le bureau de la compagnie russe «Stroytransgaz» dans la ville de Homs. Aujourd'hui même à l'ouest de Damas on a tiré sur le bus avec des spécialistes russes. Un de ces jours les médias ont annoncé des conflits près de la ville d'Al-Heffa dans la province de Lattaquié. En cours de la tentative de l'envahissement par les combattants de l'«Armée syrienne libre» d'un nombre d'institutions d'Etat et privées, de l'attaque aux habitants pacifiques, deux ambulances ont été détruites.

Si on étudie les statistiques dès le début des événements en Syrie, alors dans cette période 34 médecins ont été tués, 42 médecins grièvement blessés, certains ont péri avec leurs familles. 24 hôpitaux, 84 policliniques ont subi des attaques et le pillage, environ 200 ambulances ont été partiellement ou entièrement abîmées. Contre qui combattent les gens qui font ça? Contre les médecins et les habitants pacifiques?

Ces dernières années en Syrie multiconfessionnelle on ignorait des cas des persécutions ou des meurtres pour des raisons de religion. Aujourd'hui les cas pareils malheureusement ne sont pas rares et y arrivent de plus en plus souvent. Les médias annoncent que des dizaines de chrétiens sont déjà devenus victimes de la haine religieuse. Beaucoup de chrétiens sont contraints à quitter le pays où leurs ancêtres vivaient pendant deux millénaires. Des églises deviennent désertes. Des tirs des mortiers, des lance-grenades portatifs antiblindés, des armes d'infanterie ont touché un nombre de monastères et de temples, dont le monastère célèbre à Sidnay, où on garde une icône de la Vierge, peinte, selon la légende, par le Saint Luc. L'église syriaque Al-Um Zennar à Homs, où les gens de différentes confessions venaient pour saluer une parcelle de la ceinture de la Vierge a également subi des attaques.

De simples syriens, de citoyens russes résidant dans la République arabe syrienne, de journalistes qui y travaillent dans les conditions très difficiles, nous connaissons pas mal de cas de la persécution par les opposants et leurs partisans des personnes exprimant leur sympathie ou tout simplement manifestant une loyauté envers les autorités syriennes. On déposait des engins explosifs vers leurs maisons, on tuait leurs parents, on les menaçait, enlevait leur bien, exigeait le versement du tribut aux formations armées illégales.

Quelques mots à propos de ce comment les combattants traitent les journalistes, y compris pour la compassion manifestée envers les combattants. Avant-hier sur l'Internet on a parlé du journaliste britannique le correspondant de la chaîne "Channel 4 News" Alex Thompson, qui a raconté ce qui lui était arrivé dans la ville syrienne de Qusayr, près de la frontière libanaise. Il avait visité le cantonnement des combattants, après quoi avec son chauffeur jouant le rôle d'interprète et deux autres journalistes, est reparti. Les combattants qui l'accompagnaient, «les révolutionnaires armés» ont pris congé et lui ont conseillé de suivre le chemin qui devait inévitablement amener leur voiture sous les balles des militaires syriens. Le journaliste croit que ce n'était pas une faute – on lui a monté un coup dans l'intention d'utiliser sa mort imminente dans le but de la propagande contre Assad. Heureusement, cela n'a pas eu lieu. Vous pouvez lire cette histoire sur Internet, elle est assez instructive.

En gros en parlant des médias on veut tous une plus grande liberté de la parole. Mais quand l'Union européenne, la Ligue des états arabes prennent des décisions autoritaires pour bloquer la diffusion des chaînes syriennes publiques et privées, certainement, cela ne s'inscrit pas tout à fait dans la notion de la liberté de la parole. On se rappelle tout d'un coup les bombardements de centre de télévision à Belgrade, Tripoli. On doit comprendre que c'est la liberté de la parole, comment elle doit être respectée pas seulement à l'intérieur du pays, mais également par la communauté internationale, à quel point il est important d'assurer l'accès à l'information quelle qu'elle soit. Nous considérons absolument inadmissible la situation quand la propagande du néonazisme interdite par toutes les résolutions possibles de l'ONU, par le tribunal de Nuremberg est justifiée comme une manifestation de la liberté de la parole et quand on applique aux médias des standards tout à faits différents, comme c'était à Belgrade, Tripoli et se passe aujourd'hui en Syrie.

A mon avis, des faits cités il est clair que la responsabilité de ce qui se passe n'incombe pas seulement au gouvernement syrien. Les événements qui ont lieu sont pour beaucoup le résultat des actions de ceux qui n'arrêtent pas le financement des formations armées illégales, recrutent des mercenaires, les aident à franchir la frontière et font des avances à toutes sortes d'extrémistes pour la réalisation de leurs propres buts géopolitiques. A ce qu'on peut conclure, ces buts sont dans une grande mesure définis par le facteur confessionnel.

On est sérieusement inquiété par la croissance de l'activité des réseaux terroristes et extrémistes internationaux en Syrie. En parlant de l'application de standards unis, de la justice par rapport à une telle ou telle situation, je rappelle, que pour justifier la nécessité de l'intervention externe aujourd'hui on indique de plus en plus souvent le problème des réfugiés de la Syrie. Si on consulte les statistiques, selon les données du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), la quantité de gens ayant quitté la Syrie atteint aujourd'hui 80 milles personnes. Parmi eux environ 28 milles personnes au Liban, 5 milles personnes – en Iran, 21,5 milles personnes – en Jordanie et environ 25 milles personnes – en Turquie. Ces gens, bien entendu, ont besoin de soutien. On compte sur ce qu'on assurera un accès à tous les camps de réfugiés pour les spécialistes de HCR ONU, mais, sans doute, le chiffre 80 milles personnes va augmenter. Néanmoins il faut le comparer avec d'autres paramètres. Par exemple avec la quantité de réfugiés en Syrie même. Selon les évaluations qui sont en gros confirmées par des sources diverses, près d'un million de réfugiés de l'Irak et environ une moitié du million d'émigrés de la Palestine habitent dans la République arabe Syrienne. Est-ce que quelqu'un a jamais pensé à eux? Je n'ai pas entendu parler d'un tel souci.

J'ai déjà cité l'exemple de la Yougoslavie. Est-ce que quelqu'un se souvient des centaines des réfugiés serbes de Kosovo et de la Slavonie orientale? C'est le groupe ethnique de réfugiés le plus important en Europe, mais personne n'en parle du tout.

Nous étions satisfait qu'au prix d'efforts importants on avait réussi de créer un instrument international pour contribuer à l'avancement au règlement pacifique en Syrie – c'est le projet de K.Annan et la Mission des observateurs de l'ONU. Ils travaillent mais néanmoins le projet du règlement a commencé à freiner. On en a parlé avec l'inquiétude ces derniers jours à l'Assemblée Générale de l'ONU et au Conseil de Sécurité de l'ONU. Nous ne voyons pas d'alternative à la réalisation de ce projet en tant qu'une voie au règlement pacifique. Je mets en relief, au règlement pacifique et pas au changement forcé du régime par une confrontation sur une large échelle avec des victimes de masse parmi la population pacifique.

Nous ne pouvons pas admettre de violence contre des gens pacifiques et devons faire tout pour en tant qu'un but prioritaire arrêter cette violence. Le projet de K. Annan donne cette possibilité. L'essentiel est qu'il soit entièrement accompli par tous sans aucune exception, y compris les joueurs externes. Grâce à ce projet le 12 avril dernier on a obtenu un armistice. Oui, il est violé, mais au début le niveau de la violence a diminué, les signes de la stabilisation de la situation ont apparu, des milliers de gens qui avaient auparavant pris des armes les ont déposées, ont profité de l'amnistie déclarée par les autorités. Plusieurs centaines de détenus politiques et de personnes arrêtées pour la participation aux manifestations antigouvernementales, ont été libérés, bien que de nouvelles arrestations aient lieu.

Le gouvernement de la Syrie a réussi à se mettre d'accord avec les experts de l'ONU de l'admission de tout un nombre d'organisations humanitaires dans les provinces les plus sinistrées de la République arabe syrienne dans le but de la réalisation du Plan humanitaire d'urgence de l'ONU, adopté par Damas. On a obtenu des progrès importants dans l'extension de l'accès aux journalistes et de la quantité des médias qui travaillent maintenant dans la République arabe Syrienne, et on a également créé un mécanisme de l'observation «sur le terrain».

Mais les premiers signes optimistes, qui ont commencé à paraître après le 12 avril dernier, évidemment, ne s'inscrivaient pas dans la logique de ceux qui agissaient selon le principe «de la politique du pire», plus vite alors la communauté internationale s'indigne définitivement et intervient dans les affaires syriennes. C'est notamment là que je vois la raison principale du fait que le projet de K.Annan commence à freiner maintenant. Nous ne voulons pas l'admettre. Nous voulons parler honnêtement et franchement avec tous qui sont d'une manière ou d'autre «liés» à la crise syrienne, des raisons réelles de la défaillance et du blocage dans la réalisation des dispositions du projet de l'envoyé spécial de l'ONU/LEA. Pour beaucoup ces défaillances ont des racines dans la non-coordination des démarches de joueurs externes. Il est seulement important de comprendre si cette non-coordination est provoquée par l'absence d'un terrain de dialogue ou elle résulte d'une ligne préméditée à l'inexécution du projet.

Nous espérons que la raison consiste en ce que nous parlons peu franchement entre nous. Certes il y a le Conseil de sécurité de l'ONU, mais d'autres joueurs très importants restent en dehors – la Ligue des états arabes, la Turquie, l'Iran, les pays voisins à la Syrie – le Liban, la Jordanie et l'Irak. Il faut que tous se réunissent et en partant du projet de K.Annan et des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, qui l'ont approuvé et ont sanctionné la Mission des observateurs de l'ONU, appuyer ces documents très importants. Nous devons honnêtement et franchement, en se regardant les yeux dans les yeux, convenir que si en paroles nous avons tous approuvé le projet de K.Annan et l'avons entériné d'un consensus dans le Conseil de sécurité de l'ONU, alors il faut en fait influencer activement tous les Syriens sans exception, pour les forcer à cesser de combattre et se mettre à table des négociations.

Je suis sûr, que si dans cette direction on manifeste la volonté solidaire de tous les jours extérieurs principaux, le résultat sera acquis. Et ensuite on pourra tout de suite passer au début d'un dialogue politique, bien sûr se basant sur le projet de K.Annan qui suppose la nécessité pour l'opposition de s'unir sur la base de la bonne volonté pour un tel dialogue, ainsi que le début des pourparlers entre le gouvernement et tous les groupes syriens d'opposition.

En partant de ces évaluations et considérations, nous proposons de commencer d'urgence le travail sur la préparation d'une conférence internationale sur la Syrie. Il s'agit d'un groupe compact de participants. Je répète, le but de la conférence est de prêter assistance à la réalisation du projet de K.Annan et aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, et rassembler tous ceux, qui influencent chaque jour la situation en Syrie. A notre avis, dans ce forum doivent prendre part cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'O NU, les voisins de la Syrie – l'Irak, le Liban, la Jordanie, la Turquie et les représentants de la Ligue des états arabes. A propos, l'Irak préside à présent la Ligue des états arabes. Il faut également inviter le Qatar qui préside le Comité de la Ligue des états arabes sur la Syrie. Ce serait important d'inviter à la table des pourparlers l'Arabie Saoudite comme le plus grand pays du golfe Persique, l'Iran. Nous croyons que cette manifestation doit avoir lieu sous « le parapluie » de l'ONU. Parmi les participants je verrais également l'Union européenne qui manifeste un intérêt vif aux événements en Syrie et veut surmonter la crise en cours, comme cela s'est avéré pendant nos entretiens pendant le Sommet Russie – UE qui a eu lieu le 3-4 juin à Saint-Pétersbourg.

Nous voulons que pendant cette conférence ait lieu un dialogue franc au cours duquel on saura au juste à quel point il est réel de s'accorder sur les actions coordonnées, solidaires, visant, comme on dit, «le même but» par rapport au gouvernement de la République arabe syrienne ainsi qu'à tous les groupes de l'opposition.

En ce qui concerne les délais de la convocation de la conférence – le plus tôt sera le mieux. Bien entendu, on ne peut pas se réunir tout simplement sans avoir discuté tous les aspects avec les pays mentionnés. Certainement, des rencontres d'expertise seront nécessaires. Nous coopérons activement avec tous nos collègues et croyons que maintenant il est en principe important de créer le fond d'information, disposant à la recherche des voies de la cessation la plus rapide de la violence et au début d'un dialogue politique. Si tous les jours retentissent des appels à l'intervention armée la plus précipitée dans les affaires syriennes, des accusations sans présentation de faits quelconques à l'adresse du régime de B.Assad, et nos collègues n'attendent pas les résultats de l'enquête menée par les observateurs de l'ONU et des agences humanitaires, y compris le Conseil des droits de l'homme, s'ils disent chaque jour «la Russie n'a que donner un ordre à B.Assad et tout se tassera», nous n'atteindrons aucun résultat.

C'est pourquoi la responsabilité et encore une fois la responsabilité. Car les déclarations irresponsables peuvent aboutir aux incendies que nous ne pourrons pas arrêter après. On ne peut pas envoyer des signaux qui chaque jour renforcent la conviction de l'opposition qu'on est sur le point de l'aider de la même façon qu'en Lybie.

Question: Sergei Viktorovich, peut-on affirmer maintenant que certaines forces poussent volontairement le plan de K. Annan à l'échec? Est-ce que ces tentatives peuvent réussir d'autant plus que la Russie et la Syrie sont les seuls pays à suivre ce plan?

S.V. Lavrov: Dans mon allocution j'ai déjà insisté sur le fait qu'il existe des forces très puissantes qui voudraient faire échouer le plan de K. Annan afin de prouver que les autorités syriennes sont incapables de réaliser ce document et de justifier ainsi l'utilisation des forces armées pour mettre fin à cette crise. On peut voir ces tentatives à l'œil nu. Même les non spécialistes peuvent comprendre de quoi il s'agît et qui se cache derrière de telles ou telles appels, déclarations ou accusations.

J'ai déjà indiqué que le Conseil de sécurité n'a pas sanctionné l'intervention militaire. Et ce n'est pas parce que nous défendons B. Assad ou son régime, mais parce qu'on se rend compte de la composition interconfessionnel mélangé de l'Etat syrien. Nous comprenons également que certaines forces qui appellent à l'intervention militaire veulent perturber la composition interconfessionnelle de la Syrie et de faire de ce pays un polygone de la guerre pour la supériorité dans le monde islamique. C'est une tendance très dangereuse. La Russie fera tout son possible pour prévenir un tel scénario.

Quand on entend des appels adressés au Conseil de sécurité de l'ONU de sanctionner les actions prévues par le Chapitre VII des Statuts, où il s'agît des mesures forcés jusqu'à l'utilisation de la force militaire, nous ne pouvons ne pas évoquer les événements en Lybie où une résolution a été adopté au consensus et l'autre n'a pas été soutenue ni par la Russie, ni par la Chine. Et toutes les deux résolutions ont été violées par l'OTAN qui s'est offert de les réaliser. Aucun pays qui supportait les rebelles n'a respecté la décision prise en consensus sur l'embargo mis sur la livraison des armes.

Nos collègues de certains pays arabes et européens déclarent ouvertement et même avec fierté qu'ils ont livré les armes aux opposants du régime de M. Kadhafi. A quoi bon alors proposer un embargo sur la livraison des armes?

Je voudrais souligner une fois de plus que nous ne défendons pas le régime, mais la stabilité dans cette région et dans le monde islamique ainsi que le droit international. Le résultat final de la crise syrienne influencera l'ordre du monde – va-t-il s'appuyer sur les Statuts de l'ONU ou ce sera le monde où le plus fort a toujours raison ?

Question: Est-ce que la Russie possède les preuves qui démontreraient que l'opération militaire de l'opposition syrienne est contrôlée ou commandée par les forces extérieures?

S.V. Lavrov: Nous avons assez d'informations sur la livraison des armes et d'autres munitions à l'opposition, ainsi que sur l'assistance d'information offerte à l'Armée syrienne libre (ASL). Nous savons qui dirige cette « armée » et qui est à la tête de différents groupes qui en font partie. Certains sont très disciplinés, les autres sont moins coordonnés. Nous savons où se trouve le quartier-général de l'ASL et quels pays lui accorde une aide financière. D'ailleurs, nos collègues saoudites et qataris ne le cachent pas.

Hier (le 8 juin), à Istanbul il y a eu le Congrès des hommes d'affaires syriens où on a annoncé la création du Fonds du financement de l'ASL. Je suis persuadé que les services secrets sont beaucoup plus informés, y compris les services secrets britanniques qui sont très réputés dans ce domaine. Toutes les informations sont disponibles et accessibles à tous les pays européens et à l'OTAN. Nous en sommes au courant. Dans les entretiens privés ; sans journalistes, nos collègues étrangers font preuve d'une parfaite connaissance de ce qui se passe en fait en Syrie.

Question: Est-ce que la Russie et les USA ont discuté la possibilité du scénario à la manière de Yémen avec la démission de B. Assad et son départ de la Syrie ?

S.V. Lavrov: En ce qui concerne le scénario «yéménite», je ne voudrais pas réduire la situation à des schémas primitifs. Au Yémen, la situation reste encore assez tendue malgré l'avancement du plan de la sortie de la crise qui consistait justement en ce dont vous avez parlé. Les parties yéménites se sont mises à table et ont abouti à un consensus. Il n'y avait pas de conditions préalables comme, par exemple, la démission du Président. Le plan de règlement pacifique était le résultat des accords. Si les Syriens étaient capables d'arriver à des accords pareils, nous serions très ravis de supporter une telle solution. Je suis persuadé que les autres pays aussi. Je pense qu'il est inadmissible d'imposer de l'extérieur les conditions du dialogue. Ce n'est pas une bonne voie à la résolution stable du problème. Les Syriens doivent eux-mêmes choisir leur destin et trouver un terrain d'entente à travers l'expression de la volonté du peuple.

La conférence que nous proposons a été conçue de façon à créer les conditions favorables au dialogue sans intervention des joueurs de l'extérieur. Actuellement, ils empêchent ce processus en incitant une des parties à poursuivre « une lutte de libération » jusqu'à ce que la communauté mondiale se mêle avec une intervention militaire. Je cite Burhan Ghalioun, président provisoire du «Conseil national syrien», qui a déclaré récemment : «Poursuivez la lutte de libération jusqu'à ce que l'intervention extérieur commence».

La conférence que nous proposons, si cette idée est retenue, doit comporter quelques étapes avec la création éventuelle des mécanismes de fonctionnement. Elle est appelé à limiter l'intervention négative des joueurs extérieurs au conflit et à réorienter l'énergie, la volonté et les capacités des forces extérieures à l'arrêt du massacre et au lancement du dialogue national en Syrie. Notre objectif est de créer de telles conditions et c'est aux Syriens eux-mêmes de négocier et de trouver une entente.

Question: Dans les mass-médias étrangers et parmi les experts, on parle de plus en plus souvent de la livraison des armes russes en Syrie. Ce sujet apparaît dans de nombreuses publications, par exemple, en Grande-Bretagne, ce qui fait semblant que c'est les armes russes qui sont braquée contre les civils.

Pouvez-vous nous donner les arguments qui pourraient arrêter ou au moins minimiser les spéculations à ce sujet?

S.V. Lavrov: Ou bien démentir ces mensonges.

La Russie ne livre aucunes armes au gouvernement syrien qui, avec une grande imagination, pourraient être utilisées contre les manifestants pacifiques. Nous achevons les contrats qui ont été signés et payés il y a bien longtemps. Ces contrats concernent les moyens de la défense aérienne. Ces moyens ne peuvent être utilisés que dans le cas où la Syrie serait attaquée de l'extérieur. Nous ne livrons plus rien. Quand les mouvements en Syrie ont commencé, nous avons pris une décision spéciale qu'en cas de demande nous n'allons pas exporter les armes ni autres moyens qui pourraient être utilisés pour la répression des manifestations dans le pays.

Nos collègues américains expédient les armes dans certains pays du Golf. Ces armes pourraient justement être utilisées contre les manifestants. Récemment, ils ont passé encore un contrat pareil.

Comme vous vous souvenez, au cours du conflit au Liban, on a annoncé un embargo sur les armes. Et alors? Personne n'a rien vendu au gouvernement à Tripoli, mais l'opposition a été littéralement dopée des armes. Sur le territoire libyen, on pouvait trouver non seulement les rebelles, mais aussi les forces spéciales européennes.

C'est encore un exemple qu'il faut être honnête. Ceci pourra servir dans l'avenir.

Question: Sergei Viktorovich, vous avez déjà noté que ces derniers temps, les groupes terroristes sont beaucoup plus actifs. Heureusement, dans les derniers crimes il n'y avait pas de victimes parmi les familles des spécialistes russes. Hier, aux alentours de Damas, on a fait sauter un transformateur. Pourtant certains joueurs extérieurs restent fidèles à leurs déclarations de vouloir suivre le plan de K. Annan. Ces derniers temps, il y a beaucoup de spéculations affirmant que la position russe pourrait être révisée. Peut-on considérer la dernière initiative russe d'organiser la conférence internationale que K. Annan a traitée d'un « groupe de contact » comme le changement de la position de la Russie par rapport au plan de l'envoyé spéciale de l'ONU/Ligue arabe ?

Les citoyens syriens dans le monde entier voudraient entendre encore une fois si ces rumeurs sont justifiées et pourquoi ils ont été lancés justement à l'heure actuelle?

S.V. Lavrov: Dans mon allocution, j'ai déjà fait remarquer qu'il n'y a absolument aucun raison de réviser notre position. Si quelqu'un voit un tel signal derrière l'initiative russe d'organiser la conférence, je dois dire que ces gens-là ne comprennent pas la position de la Russie. Nous sommes loin de ne rien faire en disant sans cesse que nous allons mettre le véto à toutes les propositions, non. Notre approche a beaucoup plus d'initiative. Notre position est plus active. Nous essayons de trouver les solutions au conflit, de faire avancer le processus. C'est pourquoi en août 2011, la Russie a initié le projet de la déclaration du président du Conseil de sécurité de l'ONU qui a été finalement adapté. Nous étions les premiers à proposer que le Conseille s'interroge sur la situation en Syrie.

En septembre dernier, et après, un peu plus tard, la partie russe a mis en œuvre les projets des résolutions basées sur la nécessité d'influencer toutes les parties syriennes. A l'époque, les pays occidentaux n'ont pas adopté ces résolutions. En novembre 2011, nous avons soutenu la résolution de la Ligue arabe d'envoyer en Syrie ne mission d'observateurs de la Ligue des pays arabes. Nous avons persuadé les pouvoirs syriens d'accepter cette proposition et de recevoir une mission de surveillance. Ce n'était pas facile. Je répète que le gouvernement syrien a commis beaucoup d'erreurs en prenant assez tard les décisions évidentes qui pourraient changer la situation vers le mieux.

En plus, nous avons persuadé les pouvoirs syriens de recevoir la mission des observateurs arabes. Nous avons fait tout notre possible pour augmenter le nombre d'observateurs, pour qu'ils rapportent au Conseil de sécurité de l'ONU. Pour une raison quelconque, les pays arabes n'ont pas voulu que le rapport des observateurs qu'ils avaient préparé au bout d'un mois de leur séjour en Syrie, arrive jusqu'au Conseil de sécurité de l'ONU. Je ne sais pas pourquoi. J'ai des idées, mais je ne peux pas l'affirmer à 100%.

Nous avons réussi à envoyer ce rapport au Conseil de sécurité. Après, la Ligue arabe a révoqué ses observateurs. Il me semble que ledit rapport était assez objectif. Il blâmait les actes inadmissibles commis par le gouvernement syrien et indiquait que la situation ne se déroule pas dans le vide, mais que les pouvoirs syriens sont confrontés à des guerriers bien armés. Je ne sais pas. Peut-être, c'était la raison de la révocation de la mission de la Ligue arabe. Peut-être, elle empêchait quelqu'un.

C'est la même chose qu'on voit maintenant. Nous avons contribué à nommer K. Annan envoyé spécial de l'ONU et de la Ligue arabe. Juste après, nous l'avons invité à Moscou, approuvé ses idées qui ont pris la forme du plan de six points.

Actuellement, la partie russe poursuit les mêmes objectifs. Nous n'organisons pas la conférence pour annoncer le changement de la position de la Russie, mais pour faire avancer l'exécution du plan de K. Annan qui a été approuvé en consensus par le Conseil de sécurité de l'ONU. J'ai déjà parlé du prix de consensus pour certains de nos partenaires sur l'exemple de la résolution avec la mise de l'embargo sur les armes à destination de Libye, qui n'a pas été respectée malgré le consensus. Nous voudrions nous persuader que ceux qui ont supporté le consensus sur le projet de K. Annan, l'ont fait sincèrement. A cet effet, la conférence est indispensable. C'est une sorte de test à la sincérité.

Nous déclarons net que si nos collègue sont d'accord, la conférence doit être le seul format d'appui des efforts visés à la réalisation des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU qui ont approuvé le plan de K. Annan. Ce n'est pas le «Groupe des amis de Syrie», qui en fait est le «groupes des amis du «Conseil national de Syrie». Les autres groupes de l'opposition, y compris ceux acharnés, agissant à l'intérieur du pays, ne sont pas d'accord avec une telle approche. Voilà pourquoi nous affirmons que l'opposition syrienne doit s'entendre sur leur réunion sur la plateforme du dialogue. C'était une condition du Conseil de sécurité de l'ONU.

Pourquoi alors le Conseil de sécurité ne réagit pas aux propos de Burhan Ghalioun, président provisoire du «Conseil national syrien», qui a rendu visite à Moscou et avec qui nous avons eu un entretien détaillé, et qui sollicite une intervention étrangère dans les affaires syriennes ce qui n'est pas prévu par le Conseil de sécurité ? Il refuse de dialoguer avec le gouvernement ce qui par contre est prévu par les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU.

Si quelqu'un a des inquiétudes que nous allons rendre cette conférence entre les mains du «Groupe des amis de la Syrie», je suis prêt à dissiper ces craintes. Si tout le monde veut supporter le plan de K. Annan, il faut s'unir. On peut trouver de différents noms pour cet événement – conférence, groupe de contact. La conférence peut prendre la décision de créer un groupe de contact. Mais nous devons nous unir autour d'une idée. Et le «Groupe des amis de la Syrie» n'y est capable.

La fidélité de notre position a été confirmée au cours de la visite du Président de la Russie V.V. Poutine en Chine, elle a été confirmée dans les documents conjoints u nom de tous les membres e l'OSC au cours du sommet de cette organisation qui a eu lieu à Pékin. Cette position reste inchangée, mais elle n'est pas figée, c'est pourquoi l'idée d'organiser cette conférence n'est pas un recul, mais l'évolution de notre approche. Je répète qu'au fond elle reste inchangée.

Question: Avez-vous abouti à un accord avec Fred Hof, coordinateur spécial du Département d'Etat américain pour la Syrie, après votre entretien d'hier malgré les différends autour de la participation éventuelle de l'Iran?

S.V. Lavrov: Ce sont deux mes adjoints, Guennadi Gatilov et Mikhaïl Bogdanov, qui ont rencontré Monsieur Hof. La partie américaine ne s'est pas exprimé contre notre idée que nous avons exposée en rapport avec l'initiative d'organiser la conférence. Il a été convenu de poursuivre la discussion. Hier, j'en ai parlé à Kofi Annan.

Nous espérons que cet événement sera efficace. A cet effet, il faut que toutes les forces disposant de leviers d'influence efficaces sur les parties du conflit syrien soient présentes. Iran fait partie de ces pays ayant une grande influence au gouvernement syrien. Du point de vue de la diplomatie sérieuse, il serait étourdi d'affirmer que l'Iran ne doit pas participer à la conférence, car c'est lui qui est le coupable et fait partie du problème et non pas de la solution à ce problème.

Les américains sont très pragmatiques. Quand cela revient de leurs intérêts, ils ne se préoccupent pas trop des problèmes idéologiques, y compris par rapport à l'Iran. En Iraq, quand ils voulaient réduire les risques et les menaces pour ces soldats, ils ont parfaitement contacté les iraniens et trouvé les terrains d'ententes. C'est une approche normale. Le pragmatisme dans la politique extérieur est indispensable. Mais si c'était acceptable pour sécuriser les contingents américains en Iraq, pourquoi on ne peut pas faire la même chose pour sécuriser les citoyens syriens?

La participation dans la conférence de ceux qui peuvent influencer la situation est appelée avant tout d'envoyer à toutes les parties syriennes concernées des messages de cesser immédiatement le massacre. Il s'agît de la vie des gens. J'espère qu'il n'y aura pas de doubles standards.

Question: On peut trouver les informations que la Syrie se serait adressée à la Russie, la Chine et autres pays en les demandant d'entamer les enquêtes sur le massacre à Houla. Supportez-vous cette proposition ? Quel est votre avis à l'organisation des enquêtes internationales sous l'égide de l'ONU sur les meurtres à Houla et Hama?

S.V. Lavrov: Effectivement, la Syrie a proposé à la Russie et à la Chine d'envoyer ses experts. Mais il y a une résolution qu'une telle enquête doit être menée par les experts de la Mission de l'ONU pour l'observation en Syrie. Nous considérons que cet appel est un signe de l'empressement du gouvernement syrien d'autoriser à des experts internationaux à venir dans le pays et leur montrer tout sans rien cacher. Au fond, nous saluons une telle transparence. Mais ni la Russie, ni la Chine ne se substituerait la Mission de l'ONU qui a un mandat de mener cette enquête.

Autre chose que nous avons déjà le témoignage que les spécialistes de l'ONU rencontrerons des empêchements. Ce qui s'est passé à Houla fait preuve d'un conflit entre les sunnites et les chiites, si l'on suit la composition ethnique de cette région. Les alaouites vivent très près des sunnites. Dans le contexte de la crise et d'escalade des opérations armées, y compris les terroristes et les extrémistes, les différends interconfessionnels, apaisés pendant la période de la paix interconfessionnelle, réapparaissent, y compris à cause des provocations extérieures.

C'est l'ONU qui doit mener une enquête. J'espère que ceux qui ont un levier d'influence sur les guerriers, demanderont de ne pas empêcher le bon déroulement de l'enquête ce que nous demandons également du gouvernement syrien.

Question: Sergei Viktorovich, ces derniers jours, nous avons entendu les idées de compléter ou de travailler encore le plan de K. Annan, par exemple, fixer les dates de son exécution. Quelle est votre position à ce sujet?

S.V. Lavrov: Je dirais qu'il s'agît de la précision des détails au plan de K. Annan. Je ne pense pas qu'il ne soit pas actuel. Bien au contraire, il reste très important dans tous ses éléments, pourtant chaque article doit être concrétisé, surtout ceux qui prévoient le cessez-le-feu et le début du dialogue politique. Parmi les enjeux de la conférence initiée par la Russie est l'élaboration d'un mécanisme du contrôle du respect par toutes les parties du cessez-le-feu et de l'organisation des événements pour lancer le dialogue politique.

En ce qui concerne les délais de l'exécution du plan, j'y vois aussi une tentative mal masqué de poser un ultimatum pour dire après que le temps s'est écoulé, qu'on s'en lave les mains, qu'on ne renouvelle pas le mandat de la Mission des observateurs de l'ONU, et qu'on crée ainsi la masse critique de la colère de la communauté internationale. Et personne ne pourra rien dire. Le résultat du vote au Conseil de sécurité de l'ONU sera prévisible. C'est un coup monté, c'est un « jeu » qui se lit d'un œil nu.

Aujourd'hui, j'ai déjà évoqué l'expérience des observateurs de la Ligue arabe. Ils ont été révoqués un mois après. Mais il est très difficile en un moi atteindre des résultats significatifs. Pourtant, ils ont eu le temps de faire quelque chose. Il faut accélérer progressivement le progrès, d'autant plus que les syriens eux-mêmes sont prêts à recevoir un nombre presqu'illimité d'observateurs. Il y en avait beaucoup plus que maintenant les experts de l'ONU, ils étaient presqu'un mille. Sans cette décision de de la Ligue arabe de les révoquer pour des raisons assez flous, on aurait maintenant la présence internationale dans presque toutes les régions de la Syrie. A la résolution du Conseil de sécurité, la mission arabe aurait pu être renforcée par les autres observateurs. C'est aussi une erreur

Il faut se rendre compte que la suite des décisions prises dans l'espoir d'apaiser la situation fait penser que certains nos partenaires extérieurs mener la politique en suivant le principe «tant pis, tant mieux», qu'on aura plus vite la justification à l'intervention militaire. Maintenant, nous devons nous assurer que dans certaines capitales le plan de K. Annan ne connaîtra pas le même sort. C'est pour cela que nous organisons cette conférence.

Les délais artificiels ne marchent jamais et ne donnent jamais rien. Y a-t-il un délai pour régler le problème palestinien ? Non. Pourquoi ? Tout le monde comprend la complexité du problème. Pourquoi alors dans le cas de Syrie nos approches devraient être beaucoup moins réfléchies ?

Question: La veille de ce briefing, à Washington, K. Annan et H. Clinton ont discuté la situation en Syrie. En plus des efforts de la communauté internationale nécessaire à la mise en place du plan de K. Annan, les parties ont discuté également la stratégie de la transmission du pouvoir politique en Syrie. Est-ce que ça veut dire que pour les pays occidentaux la question du changement du régime est une question déjà résolue?

S.V. Lavrov: C'est une des contradictions du sens. Comme je comprends, ces déclarations ont été faites par la Secrétaire d'Etat après la rencontre avec K. Annan. L'émissaire spécial part du fait que ce sont les syriens qui doivent trouver un terrain d'entente (au moins c'est ce que j'ai compris au cours de notre conversation téléphonique d'hier).

Nous partons du fait que les joueurs extérieurs ne doivent pas imposer leurs schémas aux parties du conflit, mais ils doivent créer les conditions favorables pour le dialogue intérieur, entre ces parties elles-mêmes. On doit les obliger à se mettre à table ronde. Mais d'aborde elles doivent arrêter le massacre et toutes actes militaires.

Je répète encore une fois que la conférence n'a pas pour objectif de décider les paramètres du règlement politique, mais de créer le contexte favorable à la poursuite des négociations par les syriens eux-mêmes. A propos, c'est ce qui se passe autour du conflit arabo-israélien, du règlement palestino-israélien ainsi que des autres crises où la communauté internationale part du principe commun disant que les parties doivent s'entendre elles-mêmes. Par exemple, le problème de Karabakh. Les co-président du groupe de Minsk de l'OSCE assurent les conditions favorables, poussent les parties à trouver un compromis, mais n'impose pas de décisions. C'est justement le modèle de comportement qu'il faut respecter, y compris dans la situation avec la Syrie.

Question: Selon le plan de K. Annan, il y a eu beaucoup de négociations et de rencontres internationales, pourtant on ne voit pas de résultats. Est-ce que les discussions plurilatérales contribuent à la réalisation du plan de K. Annan ou bien vous convoquez les parties parce que le plan pacifique se retrouve dans l'impasse et il faut chercher une autre solution?

S.V. Lavrov: A en juger d'après la question, je comprends bien que Vous suivez votre politique rédactionnelle.

Je ne pense pas que la situation avec l'exécution du plan Annan est désespérée. La conférence est convoquée justement pour assurer l'exécution dudit plan via les actions coordonnées des acteurs extérieurs afin d'influencer les formations syriennes qu'ils arrêtent la violence, engagent des négociations et se mettent à négocier entre eux - mêmes.

Je ne peux pas affirmer que le plan Annan ne satisfasse à aucune de ses clauses, comme certains de nos collègues aiment dire tout en sophistiquant la situation.

La phrase « le plan Annan n'est exécuté en aucune de ses clauses » est si criarde pour le spectateur (ou le lecteur) qui n'est pas au courant de tous les détails de ce qui se passe qu'il ne se souviendra que de cette courte thèses. Cette idée est inculquer dans les têtes des gens, et elle subjugue les esprits des masses.

Dans la première clause du plan on parle de la nécessité de travailler activement avec l'équipe de K. Annan afin de mettre au point le processus politique. Les pouvoirs de la Syrie ont des contacts avec l'équipe de l'envoyé spécial. Kofi Annan est content de ces contacts, il n'y a aucun obstacle de communication pour son équipe. L'autre question est que tout n'est pas satisfaisant dans le maintien de ses contacts, pourtant le processus n'est qu'un processus. D'ailleurs, le chef de la mission d'ONU, le général norvégien R. Mud note dans ses rapports au Conseil de Sécurité de Nations Unis que les autorités de Syrie collaborent avec lui et apportent leur aide qu'ils s'étaient engagés à fournir lors de la création de la Mission.

En ce qui concerne la clause concernant la cessation des actions de combat et la conciliation. Au départ, après le 12 avril de l'année courante les troupes syriens quittaient vraiment les villes et les villages. On les critiquait encore qu'ils ne partaient pas loin de ces villes et villages. Pourtant ils invoquent leur expérience de l'automne 2011 quand d'après le plan ligue arabe ils retiraient leurs troupes des villes qui étaient tout de suite occupées par les opposants armés. Cela prouve encore une fois qu'on a besoin d'un mécanisme qui assurerait la non-militarisation des villes après que les formations gouvernementales les aient quittées. Il faut aussi y penser, il y a aussi la place à la Communauté internationale. Mais quand l'armée syrienne perd chaque jour jusqu'à une trentaine de personnes, il ne s'agît donc plus des manifestants pacifiques qui attaquent les militaires, mais de l'opposition armée. Ni l'opposition, ni le gouvernement n'accomplissent la clause envisageant la cessation de la violence. Pourtant dans ce cas – là on ne peut pas affirmer que Damas officiel est le seul coupable et dès que les troupes gouvernementaux arrêtent de tirer tout ira bien. Les opposants armés occuperont tout de suite les arrondissements libérés. Tout le monde est au courant quels arrondissements de quelles villes sont contrôlés par les combattants.

Une clause particulière du plan est consacrée à l'aide humanitaire. Un de ces jour les autorités de la Syrie ont fini les pourparlers avec les représentants des Nations Unis, les documents permettant l'entrée de sept organisations humanitaires des Nations Unis dans le pays ont été signés; le forum sur les questions humanitaires a eu lieu à Genève avec la participation du gouvernement de Syrie, les fonds spéciaux ont été alloués, l'aide humanitaire est fournie. A mon avis, ce n'est pas mal.

Et maintenant un peu sur la libération des détenus politiques et des manifestants pacifiques arrêtés. Des centaines de personnes sont libérées. Oui, il y a de nouveaux arrêts et emprisonnement, mais on dire qu'en général rien n'a été fait ce n'est pas juste non plus. Des déclarations pareilles sont destinées à des personnes qui ne veulent pas se plonger dans les détails et se contente d'avoir des slogans courts des leurs écrans de télé ou sur Internet.

En ce qui concerne l'admission des Mass médias, nous avons conseillé il y a longtemps au gouvernement syrien d'ouvrir les frontières à tous les journalistes. Ils se sont plaints de l'attitude préconçue de la couverture des évènements en Syrie. Oui, bien sûr qu'il y a des journalistes préconçus, nous le savons, des exemples pareils existent. Par exemple, certains journalistes de la chaine Al-Jazeera ont donné leur démission pour protester contre la politique rédactionnelle. Ils ont parlé de ce qu'ils avaient été obligés à faire. Des cas pareils sont connus.

Nous avons essayé de convaincre le gouvernement syrien que l'écrasante majorité de journalistes tiennent à leur réputation et travailleront professionnellement. Malheureusement de nouveau tout n'a pas été fait à temps, et jusqu'à la fin. Après l'adoption du plan Annan la quantité de journalistes en Syrie a considérablement augmenté. Tous les journalistes n'obtiennent pas des visas pour le travail permanent, pourtant il ne serait pas correct de dire que rien n'a été fait. J'ai cité des exemples parce qu'on ne peut pas décrire la situation uniquement en noir.

Question: A votre avis, qu'est – ce que les acteurs régionaux et occidentaux agissant d'après le principe « pire c'est le meilleure » veulent réellement ? une intervention armée, des profits économiques et politiques ou bien il s'agit d'une arrière-pensée religieuse ?

S.V. Lavrov: Je ne peux pas deviner ce qu'ils veulent en réalité. Je peux vous parler de nos impressions et à quoi cela peut amener. Tout cela peut aboutir par un coup sérieux à la stabilité qui a été déjà gravement compromise dans le pays. Les conséquences seront inattendues et imprévues et toucheront beaucoup de pays, et le fait que le monde musulman se brise entre les sunnites et les chiites sera le noyau de tout ce processus.

J'espère que ce n'est pas ce que désirent tous ceux qui occupent la position ferme en faveur du changement du régime en Syrie. D'après nos estimation un tel scénario est probable si nous ne prenons pas de mesures décisives et coordonnées afin d'agir sur tous les acteurs syriens et de les obliger à cesser mener la guerre et se réunissent autour de la table de négociations.


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