15:37

Interview de Dmitri Mezentsev, Ambassadeur de Russie au Belarus, à l'agence de presse TASS, 16 octobre 2019

2121-18-10-2019

Question: On sait que la Russie et la Biélorussie entretiennent des contacts étroits, notamment au niveau des régions. Ces derniers temps, les voyages des dirigeants des régions russes en Biélorussie se sont fait plus fréquents. Le gouverneur de la région de Novgorod, Andreï Nikitine, arrive aujourd'hui à Minsk.

Réponse: Vous avez parfaitement raison. Prochainement notre agenda comprend la venue du gouverneur de la région de Sverdlovsk, Evgueni Kouïvachev, puis la visite du gouverneur de la région de Kaliningrad Anton Alikhanov, et en décembre nous attendons une grande délégation du Tatarstan sous la direction de Roustam Minnikhanov.

Question: Que signifient ces contacts pour nos relations interétatiques?

Réponse: Nous sommes convaincus que les possibilités d'interaction dans des dizaines de domaines sont immenses. Cela s'inscrit de manière organique dans l'éventail des relations entre les deux États qui détermine, au fond, le potentiel de l’État de l'Union.

En décembre sera célébré le 20e anniversaire de la signature de l'accord sur l’État de l'Union. Nous voyons que le travail sur l'agenda d'intégration a atteint l'ampleur et la profondeur attendues. Nous comprenons que la formation de liens horizontaux entre les associations d'affaires, les sociétés, les représentants de la coopération de consommation au format "région-région", permet également de déboucher rapidement sur la mise en œuvre de plans communs, d'assurer des échanges qui apportent non seulement des revenus à leurs acteurs et partenaires, mais optimisent également la logistique de transport, la structure des marchés régionaux et, surtout, correspondent aux besoins des citoyens.

Tout cela fait partie parmi des tâches d'envergure que déterminent immuablement pour nos pays le Président russe Vladimir Poutine et le Président biélorusse Alexandre Loukachenko, ce qui a été également réaffirmé lors des pourparlers entre les deux dirigeants en juillet 2019 à Saint-Pétersbourg dans le cadre du 6e Forum des régions de la Russie et du Belarus. Les discussions objectives au palais de Tauride ont prouvé une nouvelle fois que le dialogue interrégional était nécessaire. Pendant le forum, qui s'est déroulé avec succès sous la direction de la Présidente du Conseil de la Fédération Valentina Matvienko et du Président du Conseil de la République de l'Assemblée nationale biélorusse Mikhaïl Miasnikovitch, ont été prises des décisions importantes déterminant non seulement la nature de la coopération dans le domaine commercial et économique, mais ayant également une nature stratégique.

Aujourd'hui, quand dans nos pays a grandi une génération de jeunes gens assez prospère, orientée sur les hautes technologies, un travail prestigieux, un certain confort social, nous devons faire beaucoup de choses pour que la jeunesse contemporaine comprenne plus profondément les étapes principales et cruciales de l'histoire contemporaine. Pour que ces jeunes gens talentueux soient plus proches les uns des autres, fassent connaissance et, surtout, forment ensemble une vision de l'avenir pour penser comment pourrait être et sera le monde duquel ils assumeront la responsabilité dans littéralement 20-25 ans. C'est sur leurs épaules que reposera la tâche d'approfondir les relations entre nos pays. Et il est très important que dans 25 ans également leurs contacts, leur amitié et leur entente, qui se forment aujourd'hui, constituent la base de la conviction de la nécessité de maintenir les traditions historiques, slaves et religieuses de nos peuples. Et il est très important que nous gardions ouvertes les portes de nos "maisons nationales" aussi bien au sens propre que figuré.

Au programme des visites des dirigeants des régions de la Russie et de la Biélorussie figurent des entretiens avec le Président biélorusse Alexandre Loukachenko, avec le Premier ministre biélorusse Sergueï Roumas, avec les membres du Cabinet, avec des partenaires de longue date. De plus, à l'initiative du chef de l'Académie des sciences de la Biélorussie Vladimir Goussakov, seront organisées des rencontres au "siège" des recherches scientifiques de la Biélorussie. C'est important pour maintenir le système des relations entre les jeunes chercheurs, la coopération universitaire et scolaire dans des dizaines de domaines de la coopération culturelle et sociale.

Question: En parlant de la coopération culturelle, nos pays sont unis par la langue, la religion, la tradition historique et de vastes liens culturels. Comment se développent aujourd'hui les relations dans ce domaine, quels contacts culturels entretenons-nous?

Réponse: Je voudrais revenir un peu en arrière, à cet été. Nous souhaitons exprimer nos remerciements pour l'organisation, de concert avec les autorités biélorusses, le comité exécutif de Minsk, d'une grande fête: les Journées de la Russie multiethnique à Minsk. Et nous remercions les habitants de Minsk, les visiteurs de la ville, pour l'écho qu'il lui ont donnée.

482 artistes sont venus de Russie, une "cité théâtrale" a été construite pour nous, ainsi qu'une immense scène au centre de la capitale biélorusse. Nous voulions présenter aux amis biélorusses, à tous les spectateurs des festivités de différentes générations, l'art dont sont riches les régions de la Fédération de Russie: les régions de Saint-Pétersbourg, de Kalouga, de Saratov, de Samara, de Riazan, de Smolensk, du Daghestan, du Bachkortostan, de Moscou et de Saint-Pétersbourg. Et nous avons réussi. La fête, qui a commencé par la présentation des artisanats populaires de différents territoires russes, les chants et les danses dans la "cité haute", a continué sur la place devant le Palais des sports. Elle a commencé à midi et s'est terminée presque à minuit. Nous voudrions que tous ceux qui ont été nos hôtes (soit près de 20.000 personnes) aient rapporté avec eux de cette fête une partie de chaleur, d'attention et de préoccupation pour nos traditions, nos liens culturels.

En s'orientant sur la plus jeune génération, nous avons organisé les Journées des traditions sportives et culturelles de la Russie dans la fan-zone ruse des 2e Jeux olympiques européens (organisés à la perfection). Un concert d'artistes d'un style musical plus contemporain a été organisé. Selon la direction du département de l'Intérieur du comité exécutif de Minsk, nous avons compté près de 30.000 visiteurs.

Nous avons également présenté notre cérémonie de thé avec sept samovars, dont un de 50 litres, avec des beignets et des bagels. Nous remercions les partenaires biélorusses d'avoir aidé à cuire 10.000 crêpes et à les distribuer à nos visiteurs.

Mais, vous comprenez, il ne s'agit pas seulement de ça. L'atmosphère même de la fête, d'union, de joie, restera dans les mémoires à tout jamais. Et nous tenons en grande estime un aussi grand écho, dans la capitale biélorusse, pour la Journée de la Russie multiethnique et dans le cadre du programme de la fan-zone russe aux 2e Jeux olympiques européens.

Très récemment, vendredi 11 octobre, à Brest, a été inauguré un monument à Alexandre Pouchkine. A l'initiative du Ministre russe de la Culture, directeur de la Société russe d'histoire militaire Vladimir Medinski, la statue du grand poète a été transmise à Brest. Cette ville au destin légendaire, connue également dans le monde entier pour l'exploit héroïque des défenseurs de la forteresse de Brest, célèbre son 1000e anniversaire.

Le gouverneur de la région de Brest, Anatoli Lis, et le maire de la ville, Alexandre Rogatchouk, ont répondu à cette démarche russe par la construction d'un parc Pouchkine, devenu un lieu de repos pour les habitants et les visiteurs de la ville. On y organisera des soirées poétiques, probablement des débats artistiques sur le patrimoine littéraire de Pouchkine et de Mickiewicz, de Lermontov, des poètes du Siècle d'argent, d'Iakoub Kolas, d'Ianka Koupala, et d'autres représentants de l'immense "usine littéraire".

Nous apprécions tout particulièrement la présence de centaines de personnes à la cérémonie. Et le fait que le monument se trouve à présent devant la faculté philologique de l'université Pouchkine de Brest revêt une importance particulière. D'ailleurs, le parc se situe rue Mickiewicz, ce qui a également un certain sens parce qu'il est bien connu que l'amitié entre Pouchkine et Mickiewicz, leurs rencontres à Moscou, leurs débats littéraires, la discussion sur la vision du monde, est également une contribution à la vie sociale de notre Patrie commune. Et nous proposons l'an prochain de transmettre à Brest une copie du haut-relief installé sur le bâtiment près de la mairie de Moscou et consacré à l'une des rencontres entre Pouchkine et Mickiewicz dans la capitale russe.

Question: En parlant de liens culturels, on ne peut pas passer à côté de la coopération au niveau religieux.

Réponse: Très récemment, le Ministère russe de la Culture, avec le soutien du Ministère biélorusse de la Culture et de notre Ambassade, a organisé les Portes ouvertes de la culture spirituelle de la Russie au Belarus. Je reconnais qu'il était difficile de s'attendre à une discussion aussi intéressante et substantielle à la Maison de Moscou, au centre de Minsk. A cette discussion ont participé des directeurs de musée, de théâtre, des recteurs d'universités d'art des deux côtés, des responsables de collectifs musicaux connus. Cette discussion a porté sur ce qu'est la culture pour les peuples slaves, quel est le rôle de la tradition religieuse orthodoxe et ce que nous devons faire pour que les jeunes gens aspirent, malgré les préoccupations et l'agitation de la période actuelle et la numérisation du monde, à connaître le monde à travers les livres, le spectacle, à travers la communication avec l’Église.

Question: Nous parlons de l'agenda positif des relations russo-biélorusses. Mais, par exemple, la situation à Minsk autour de la citoyenne russe Anna Bogatcheva a fait beaucoup de bruit ces derniers temps. Quelles conséquences pourrait-elle avoir (et aura-t-elle) pour les relations de la Fédération de Russie et de la Biélorussie?

Réponse: En ce qui concerne la "situation" dont vous parlez, elle sera rapidement réglée.

Je souligne que l'envergure de nos relations, leur profondeur, l'orientation vers l'avenir, possède une importance primordiale pour les citoyens de nos pays et États. Je suis certain que c'est précisément le cas. Je suis également convaincu que la coopération interrégionale dont nous avons parlé et la coopération dans le domaine social, culturel, les relations entre les millions de gens, sont ce que nous devons particulièrement apprécier, tout en empêchant les opinions immédiates émotives, pas toujours réfléchies, d'impacter ces relations.

Aujourd'hui, un immense travail est mené pour élaborer la 31e feuille de route, déjà paraphée par le Premier ministre russe Dmitri Medvedev et le Premier ministre biélorusse Sergueï Roumas, intitulée "Les programmes d'action pour la mise en œuvre du traité de l'Union". Ue mise au point des positions au niveau des ministères et des institutions de nos pays est en cours. Le travail est en cours pour instaurer une économie moderne, fiable, prête pour les défis, stable, compte tenu des profits réciproques, basée sur le fondement des intérêts nationaux.

Pourquoi en parlons-nous peu? Pourquoi un épisode hasardeux, sur lequel les forces de l'ordre biélorusses ont donné des explications officielles, est placé en priorité et attire autant l'attention? Peut-être qu'aujourd'hui il faut parler autrement de la pratique et des perspectives des relations russo-biélorusses?

Question: Dans ce cas, quels événements à venir dans le domaine de la coopération sociale russo-biélorusse pouvez-vous souligner?

Réponse: Dans le cadre des plans du Service d'édition du Patriarcat de Moscou à Minsk a été ouverte une grande exposition de livres "La joie de la parole". C'est un exemple de la préservation de la tradition slave orthodoxe qui unit les peuples de la Russie et de la Biélorussie.

Dans le cadre du programme sont présentés des livres uniques, des œuvres du Patriarche de Moscou et de toute la Russie Cyrille, du métropolite de Volokolamsk Hilarion, d'autres pontifes, prêtres, tous ceux qui voient dans l'enseignement religieux un pas pour que nous devenions tous plus riches et que de nombreuses choses soient perçues plus purement et sincèrement. Cela concerne également la question que vous m'avez posée plus tôt.